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[Lect. I.]
INDE. — POÉSIE LYRIQUE.

qui m’a donné des richesses pour mille sacrifices.

2. De ce roi puissant j’ai reçu cent nichcas[1] (d’or), cent chevaux bien dressés, cent taureaux ; et moi, Cakchîvân, j’ai porté jusqu’au ciel la gloire immortelle de (ce prince) généreux.

3. Swanaya l’a ordonné, et à ma suite se sont rangés dix chars noirs, qui chacun portait une femme ; mille soixante vaches les accompagnaient. Tels sont les biens que Cakchîvân reçut pour le charme de ses jours[2].

4. Les quarante chevaux blancs attelés aux dix chars viennent en tête de la ligne des vaches. Enivrés d’orgueil et ornés de ceintures, les Padjras rassemblent ces chevaux tout brillants d’or.

5. Mais en premier lieu j’ai reçu pour vous[3] trois chevaux et huit vaches de prix. Les Padjras, qui sont mes bons parents, montés sur leurs chars, ont voulu, comme par un cortége populaire, honorer ma gloire.

6. (Româsa, fille de Swayana, épouse de Cakchîvân, parle à son beau-père.) — Il m’a acceptée pour femme, et je tiens à lui comme (l’écuyer) au fouet qu’il serre (dans sa main). Mon époux m’accorde la jouissance de mille biens précieux.

7. Daignez me permettre de vous approcher. Ayez pitié de ma faiblesse. Je serai toujours Româsa[4], c’est-à-dire la brebis des Gandhâras.


HYMNE VI.

À Agni, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî[5].)

1. Je chante Agni le sacrificateur, (Agni) bienfaisant et riche, l’enfant de la Force appelé Djâtavédas ; oui, Djâtavédas, qui est comme notre prêtre ; ce dieu qui préside aux bons sacrifices, qui, de sa flamme qu’il dresse et dirige vers les dieux, saisit le beurre frémissant et entoure d’un vif éclat l’offrande pieuse.

2. Toi, le plus grand des sacrificateurs, le premier des Angiras, nous voulons, dans nos sacrifices, l’invoquer par de saintes prières, oui, par de pures et saintes prières ; toi qui tournes autour du ciel, pontife des humains, orné d’une chevelure brillante, (dieu) libéral que doit respecter ce peuple ; oui, que pour son bonheur doit respecter ce peuple.

3. Resplendissant avec l’éclat de l’or, (Agni) détruit le mal ; oui, comme la hache il détruit le mal. Devant lui, tout ce qui est fort s’écoule ainsi que l’eau. Repoussant tout ce qui est robuste, il lutte ; il n’est pas ébranlé ; oui, tel que l’archer vigoureux, il n’est pas ébranlé.

4. (Le serviteur fidèle), préparant la (demeure) solide[6] de ce (dieu) sage et prévoyant, fait briller les feux de l’aranî, et pour obtenir sa protection il honore Agni ; oui, il l’honore par une offrande pour obtenir sa protection. Ainsi que l’eau, Agni pénètre tout ; son ardeur déchire ; les plus solides aliments, il les consume avec force ; oui, il consume avec force les plus solides (aliments).

5. Non loin du foyer, nous déposons la nourriture destinée à ce (dieu), qui, dans les ombres de la nuit, brille mieux que le jour lui-même ; oui, pour l’homme diligent, mieux que le jour lui-même. Son existence, qui fut un instant comme éclipsée, devient pour celui qui fait des libations une espèce de rempart solide. (Mortel) pieux et (mortel) négligent, les feux protégent tout le monde ; immortels, ils animent tout ; oui, les (feux) immortels animent tout.

6. Ainsi Agni, résonnant, comme le puissant Marout, dans ces campagnes où tant d’œuvres s’accomplissent, exerce sa charge de sacrificateur ; oui, au milieu de luttes pénibles, il exerce sa charge de sacrificateur. Il reçoit les holocaustes et les dévore, étendard du sacrifice, objet de vénération. De ce (dieu) qui aime et répand le plaisir, que tous les hommes suivent la voie ; oui, qu’ils suivent sa voie pour arriver au bonheur.

7. Quand placés autour de lui[7], brillant de ses clartés, poursuivant leurs chants et leurs prières et attisant (son ardeur), les Bhrigous invoquent (Agni) ; oui, quand les Bhrigous invoquent (Agni) et lui présentent leurs offrandes, le dieu s’élève avec pureté ; maître et gardien des trésors, il protége ses serviteurs, ses amis, avec une

  1. Le Nichka est une mesure de poids appliquée à des quantités différentes. Voy. Wilson, Dictionnaire, à ce mot, et Prinsep (Useful tables).
  2. Le commentateur entend que le don s’est fait au milieu du jour.
  3. Cakchîvân s’adresse ici à Dîrghatamas, son père, et à sa famille.
  4. Ce mot signifie brebis. Le Gandhâra, que l’on identifie avec le Candahar, était fameux par ses troupeaux.
  5. Cet hymne, outre le mètre atyachtî, en offre d’autres, tels que le dhriti, l’outcriti, l’aticriti, le sancriti, le vicriti, le pracriti, le criti, c’est-à-dire des mètres de 4 padas, et quelques-uns de plus de 100 syllabes. Voy. Grammaire de Wilson, page 424 et suivantes.
  6. J’ai vu dans ce passage l’action du sacrificateur qui prépare les bois formant l’aranî, et qui en fait jaillir le feu.
  7. Le mot dwitâ peut offrir différents sens. Le commentaire le rapporte à deux espèces de feux, âhavanîyâdî.