Page:Langlois - Rig Véda.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.
5
PRÉFACE.

tard, l’homme qui ne développe son intelligence qu’en cherchant à se rendre compte des phénomènes de la création, rencontre des forces diverses et y veut reconnaître des attributs divins, constate des contradictions violentes, et se persuade qu’elles sont dues à une puissance rivale. De là les premières erreurs, les premières dérogations à la logique primitive, c’est-à-dire la dualité adéquate du bien et du mal.

Pour bien comprendre les religions, véritable origine de la pensée, il faut en simplifier l’étude, rechercher le principe de tous les cultes jusque dans les erreurs relativement les plus modernes, dégager le fond des formes surchargées qui l’entourent, et alors, dans le naturalisme védique, on retrouvera Agni, le lumineux, dans ce peuple d’âmes célestes qui caractérise les cultes zoroastriens, Zervan-Ackéren, l’infini, dans le sabéisme des Chaldéens Bel, le dominateur des astres, dans la foule des triades égyptiennes, Ammon, le père des dieux et des hommes, dans le polythéisme assyrien, le Dieu que personne ne blesse, dans le Tien des Chinois, le maître du ciel, dans le Nirvana bouddhique l’unité absorbante, dans Lao-Tseu, l’appétit de Dieu, dans Socrate, sa démonstration, dans Platon, son rêve. Cette constatation divine, cette prescience de la vérité qui n’est qu’un souvenir des âmes les mieux douées, confiance chez les plus faibles, inspiration du génie chez les plus forts, ces mystères de l’esprit en gestation d’une idée fécondante, voilà la grande et glorieuse conséquence de l’étude approfondie de l’antiquité.

Mais que de desiderata renferme la science historique, puisque nous ne savons rien sur ces mystérieux Pélasges, qui n’ont laissé sur leurs traces que des amas de terre et de pierres, des tombeaux et des murailles ; rien sur ces nobles Étrusques, dont un conquérant, aussi absolu que dédaigneux a effacé l’empire sans pouvoir pulvériser l’industrie, et dont l’art, relativement avancé et naïvement élégant, a surgi un jour de la terre, sa fidèle gardienne, comme une protestation contre les destructeurs de sa civilisation ; rien sur les Himyarites, ces premiers agriculteurs de l’Yémen, que les fils d’Ismaël ont vaincus et remplacés ; rien sur les Adites, de la race de Kousch, qui furent les premiers despotes de la Chaldée ; presque rien sur les Phéniciens, ces premiers navigateurs de la Méditerranée, ces premiers colonisateurs de ses rivages. Et les Finnois, qui nous ont laissé un poëme, sans nous laisser une histoire ; et les Atlantes, ces habitants d’une île immense, sombrée entre l’Afrique barbare et l’Amérique inconnue ; et les Ibériens ou les Proto-Espagnols, qu’on dirait autochtones, tant ils s’enfoncent dans les siècles ; et, de l’autre côté de l’Atlantique, ces premiers conquérants du Mexique, venus du nord de l’Asie, en contournant les rivages rigides du pôle arctique, et tels que les rappelle une curieuse représentation, conservée à Mexico, pages naïves d’une légende immémoriale ; et tant de nations ou au