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500 livres. Quand le roi revint d’outre-mer, nous lui prêtâmes 600 livres, mais nous n’en recouvrâmes que 100 et nous lui fîmes abandon du reste. Quand le roi fit sa paix avec le roi d’Angleterre, nous lui en donnâmes 1200. Et, chaque année, nous devons au roi 200 livres tournois pour cause de la commune que nous tenons de lui, et nos présents aux allants et venants nous coûtent bien, bon an mal an, 100 livres ou plus. Et quand le comte d’Anjou, frère du roi, fut en Hainaut, on nous fit savoir qu’il avait besoin de vin ; nous lui en envoyâmes dix tonneaux, qui nous coûtèrent 100 livres, avec le transport. Après, il nous fit savoir qu’il avait besoin de sergents pour garder son fief ; nous lui en envoyâmes cinq cents qui nous coûtèrent au moins 500 livres. Quand ledit comte fut à Saint-Quentin, il manda la commune de Noyon, et elle y alla pour garder son corps, ce qui nous coûta bien 600 livres, et la ville de Noyon fit tout cela pour le comte en l’honneur du roi. Après, au départ de l’armée, on nous fit savoir que le comte avait besoin d’argent et qu’il aurait vilenie si nous ne lui aidions ; nous lui prêtâmes 1200 livres, dont nous lui abandonnâmes 300 pour avoir le reçu scellé des 900 autres. » — Ainsi, l’exploitation des villes, si fidèles, si soumises, par le roi ou en son nom était une des causes du déficit qui légitima leur mise en tutelle. Et les villes ne protestèrent pas : les doléances de Noyon sont bien timides ; on n’en connaît pas de plus hardies.

Au-dessous des prudentes aristocraties qui gouvernaient les communes, et dans les campagnes, il y avait une immense plèbe obscure, souffrante et barbare, qui ne comptait pas. Une seule fois, au temps de Louis IX, elle émerge en pleine lumière historique, bouleversée par un orage, dans un éclair. — A la nouvelle des malheurs du roi et des croisés en Égypte, vers Pâques 1251, un grand courant de compassion agita les populations mystiques, violentes, du nord de la France. Des bandes de misérables, hommes, femmes et enfants, errèrent de village en village : elles allaient délivrer le roi, conquérir Jérusalem. Bientôt, elles se formèrent en horde. Un chef surgit. Qui était-ce ? D’où venait-il ? les contemporains ne l’ont pas su ; ils disent que c’était un vieillard, de soixante ans ou environ,