Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/265

Cette page n’a pas encore été corrigée

maudit des Hohenstaufen, cette parole déjà voltairienne : « Si l’âme existe, j’ai perdu la mienne pour les gibelins. » On le voit, chez tous, le trait caractéristique de l’incrédulité est le même ; ils ont rejeté, comme superstitieuses, les croyances essentielles de toute religion ; qu’ils le sachent ou non, ils procèdent d’Averroès. Dante a groupé quelques-uns d’entre eux, Farinata, Frédéric II, Ubaldini, Cavalcante Cavalcanti, dans la même fosse infernale ; mais le plus « magnanime » de tous, Farinata, ne veut pas croire à l’enfer, dont la flamme le dévore ; il se dresse debout, de la ceinture en haut, hors de son sarcophage embrasé, et promène un œil altier sur l’horrible région qu’il méprisera éternellement :

    Ed ei s’ergea col petto e colla fronte,
    Come avesse l’inferno in gran dispitto.
   (Inf., X, 35.)

A cette métaphysique d’incrédulité, à cet effacement du surnaturel dans la vie des consciences, correspond une vue nouvelle de la nature. Ici, le miracle s’est évanoui, l’omniprésence de Dieu, cette joie des âmes pures, l’embûche perpétuelle de Satan, cette terreur des esprits faibles, ont disparu ; il ne reste plus que les lois immuables qui règlent l’évolution indéfinie des êtres vivants, les combinaisons des forces et des éléments. La renaissance des sciences naturelles avait pour première condition une théorie toute rationnelle de la nature.

C’est encore vers Aristote, naturaliste et physicien, que les Arabes, alchimistes et médecins, ramenèrent l’Italie méridionale. Vers 1250, Michel Scot traduisit pour Frédéric l’abrégé fait par Avicenne de l’Histoire des animaux. Maître Théodore était le chimiste de la cour et préparait des sirops et diverses sortes de sucres pour la table impériale. La grande école de Salerne renouvelait, pour l’Occident, les études médicales, d’après les méthodes de la science arabe, l’observation directe des organes et des fonctions du corps humain, la recherche des plantes salutaires, l’analyse des poisons, l’expérimentation des eaux thermales. Frédéric rétablit le règlement des empereurs romains qui interdisait la médecine à quiconque n’avait pas subi d’examen et obtenu la