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IV. — LES MŒURS FÉODALES DANS « RAOUL DE CAMBRAI ».


Le comte Raoul Taillefer, à qui l’empereur de France avait, en récompense de ses services, concédé le fief de Cambrai et donné sa sœur en mariage, est mort, laissant sa femme, la belle Aalais, grosse d’un fils. Ce fils, c’est Raoul de Cambrai, le héros du poème. Il était encore petit enfant lorsque l’empereur voulut, sur l’avis de ses barons, donner le fief de Cambrai et la veuve de Raoul Taillefer au Manceau Gibouin, l’un de ses fidèles. Aalais repoussa avec indignation cette proposition, mais si elle réussit à garder son veuvage, elle ne put empêcher le roi de donner au Manceau le Cambrésis.

Cependant le jeune Raoul grandissait. Lorsqu’il eut atteint l’âge de quinze ans, il prit pour écuyer un jeune homme de son âge, Bernier, fils bâtard d’Ybert de Ribemont. Bientôt le jeune Raoul, accompagné d’une suite nombreuse, se présente à la cour du roi, qui le fait chevalier et ne tarde pas à le nommer son sénéchal. Après quelques années, Raoul, excité par son oncle Guerri d’Arras, réclame hautement sa terre au roi. Celui-ci répond qu’il ne peut en dépouiller le Manceau Gibouin qu’il en a investi. « Empereur, dit alors Raoul, la terre du père doit par droit revenir au fils. Je serais blâmé de tous si je subissais plus longtemps la honte de voir ma terre occupée par un autre. » Et il termine par des menaces de mort à l’adresse du Manceau. Le roi promet alors à Raoul de lui accorder la première terre qui deviendra vacante. Quarante otages garantissent cette promesse.

Un an après, le comte Herbert de Vermandois vient à mourir. Raoul met aussitôt le roi en demeure d’accomplir sa promesse. Celui-ci refuse d’abord : le comte Herbert a laissé quatre fils, vaillants chevaliers, et il serait injuste de déshériter quatre personnes pour l’avantage d’une seule. Raoul, irrité, ordonne aux