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L’illustre fils de Vasoudéva, accompagné de la divine Roukminî, se rendit sur le mont Rêvata[1]. Celle-ci y célébra un grand jeûne[2], à la fin duquel Crichna vint pour joindre ses offrandes à celles de son épouse, et pour traiter les Brahmanes suivant leur mérite. Ses jeunes fils et ses frères assistaient à la fête dirigée par Nârada, ainsi que ses seize mille femmes, toutes resplendissantes d’un éclat digne de Vichnou. Crichna sut avec magnificence satisfaire aux demandes des Brahmanes attachés à leurs devoirs, réglés dans leurs actions comme dans leurs paroles, d’un nom et d’une famille[3] distingués, illustres, pieux et purifiés par les plus saintes pratiques que recommandent les livres sacrés. Hari, qui est le désiré des hommes ver tueux, accomplit tous les désirs de ces Brahmanes et ceux de ses parents, et se montra en cette circonstance observateur fidèle des convenances. Mais surtout il fut d’une complaisance remarquable pour tous les vœux de la fille de Bhîchmaca, de sa bien-aimée Roukminî.

Dans le temps que Crichna, aussi étonnant dans son amabilité que dans ses autres actions, était en ces lieux tranquillement assis avec Roukminî, le Mouni Nârada se présenta devant lui. Le puissant frère d’Indra, Késava, reçut le saint Brahmane avec tous les honneurs prescrits par la loi. Le vénérable Richi, en récompense de ces honneurs, donna à Crichna une fleur de Pâridjâta, dont celui-ci fit cadeau à Roukminî. Cette beauté, tendre foyer d’amour, près de Crichna, brillait de l’éclat le plus vif que puisse présenter une mortelle; mais quand, pour obéir à son époux, la fille de Bhîch maca, l’amante de Nârâyana, celle qui réunit en sa personne les attraits des trois mondes, eut placé sur sa tête cette fleur pure et divine, ses charmes furent comme doublés. Le Mouni, fils de Brahmâ, Nârada, lui dit :

  1. On se rappelle que le mont Rêvata, dont le pied est baigné par les eaux du golfe de Cambaie, était à la vue de Dwâravatî; les seigneurs Yâdavas y avaient leurs maisons de plaisance.
  2. Cette pratique de piété se nomme oupavâsa : elle consiste en une abstinence complète de tout plaisir, comme nourriture, parfums, fleurs, parures, bétel, musique et danse. Elle se termine par un repas donné à un Brahmane, avant que l’on puisse rompre son propre jeûne. Voyez à ce sujet la scène plaisante qui est vers la fin du prologue de la pièce intitulée Mritchtchacati. Voyez encore plus loin les lectures CXXXVI et suiv. du Harivansa.
  3. Les Indiens s’informent avec soin de quelle famille sont les Brahmanes. Voyez les lois de Manou, lect. III, sl. 130, 149 et pass. Les Brahmanes ont soin d’ajouter à leur nom celui de leur père et la désignation de leur gotra, mot par lequel on indique la subdivision de caste en familles. On compte vingt-quatre gotras, qui ont pour chefs des saints renommés pour leur science et leur piété, comme Sândilya, Casyapa, Gôtama, Bharadwâdja, etc.