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tous côtés : la crainte poussa ces Kchatriyas çà et là dans diverses contrées, où leur race se multiplia. Ils se réfugièrent au milieu des montagnes, où la plupart conservèrent la pureté de leur caste. Ainsi les Câroûchas soutinrent l’honneur de l’ordre des Kchatriyas. Deux des fils de Nâbhâgârichta, tombés au rang des Vêsyas, s’élevèrent ensuite à la dignité de Brahmane.

Pour Prichadhra[1], ayant blessé la vache de son Gourou[2], ô Djanamédjaya, il fut, par suite de l’imprécation de celui-ci, réduit à la condition de Soûdra : tel fut le sort des neuf fils du Manou Vêvaswata.

Ikchwâcou, son fils aîné[3], eut cent enfants, riches et magnifiques en présents. L’aîné fut nommé Vicoukchi[4] à cause de son embonpoint ; et cette raison l’empêchant d’aller faire la guerre, il habita Ayodhyâ, où il remplit avec honneur tous ses devoirs de prince. Cinquante[5] de ses frères, à la tête desquels était Sacouni, furent chargés de la défense des provinces septentrionales ; et quarante-huit autres, ayant pour chef Vasâti, furent préposés à la garde du midi. Ikchwâcou avait un jour invité Vicoukchi à l’une des cérémonies du Srâddha, appelée achtacâ[6] ; les animaux de la forêt avaient été immolés, et leur chair préparée pour le moment du sacrifice. Mais le prince,

  1. Deux manuscrits donnent Vrichadhra : d’après celui de M. Tod j’ai mis Prichadhra.
  2. Gourou, en latin gravis, est le nom que l’on donne au maître de qui on a reçu l’éducation spirituelle. Rien ne peut égaler le respect qui lui est dû, et ce passage montre quelle pouvait être la punition d’un outrage fait à la sainteté d’un Gourou ; car les Soudras étaient les serviteurs des trois autres castes supérieures.
  3. J’ai passé ici une épithète donnée au Manou Vêvaswata : c’est un mot qui signifie éternuant, क्षुवन् (kchouvan). J’ignore quelle a pu être l’intention de l’auteur, à moins qu’il n’ait trouvé un rapport entre ce mot et le mot Ikchwâcou, que cependant M. Wilson dérive de इक्षु (ikchou), canne à sucre. L’éternuement semble être un signe de mauvais présage. Quand une personne éternue, on lui dit : « Vis » ; et elle répond : « Avec vous. »
  4. Le mot कुक्षि (coukchi) signifie ventre : vicoukchi veut dire également un homme qui a du ventre ou qui est privé de ventre. J’ai choisi la première idée. J’avais eu la pensée de donner à ce mot un sens figuré ; j’avais cru que vicoukchi s’appliquait à un homme qui vivait au sein, au centre d’un royaume, les autres enfants d’Ikchwâcou se trouvant placés aux extrémités. J’ai à la fin rejeté cette explication, quoiqu’il me fût possible de l’appuyer sur celle que M. Wilson donne de Câracoakchîya. Outre cela, il y a dans la phrase un jeu de mots qui roule sur l’état où était le prince, ayodha (non combattant), et le nom de la ville d’Ayodhyâ ; toutefois M. Wilson traduit ce dernier mot comme signifiant une ville contre laquelle on ne combat point. Ayodhyâ est la ville d’Oude.
  5. J’ai adopté la leçon du manuscrit dévanâgari de la Bibliothèque royale. Les deux autres portent cinq cents.
  6. L’achtacâ se célébrait le huitième jour de