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bien louer pour leurs œuvres les dieux et les Richis eux-mêmes. Mais nous n’avons pas encore vu les actions de ce prince, ni les preuves de sa gloire. Comment nous serait-il possible de célébrer ses louanges ? » « Eh « bien, dirent les Richis, chantez le noble Prithou, pour les actions qui doivent le distinguer un jour. Dites ce qu’un roi doit être : ami de la vérité, toujours égal, équitable, plein d’honneur, affable, patient, fort, puissant contre les méchants, instruit dans les lois, reconnaissant, clément, aimable en ses discours, respectable, religieux, savant dans la science sacrée, doux, calme, agréable et habile à terminer les procès. »

C’est depuis cette époque, ô Djanamédjaya, que les poëtes et les chantres savants, nommés Soûtas et Mâgadhas, ont, dans les réunions solennelles, relevé par leurs éloges la gloire et le bonheur des grands.

Ils avaient chanté Prithou, et ce prince, pour récompense, donna à Soûta le pays d’Aroûpa, et à Mâgadha celui à qui ce même nom de Mâgadha est attribué[1].

Les Maharchis dirent aux mortels heureux de le voir : « Ce prince vous donnera des moyens de subsister. » Alors ceux-ci vinrent trouver le fils de Véna : « Les Maharchis, s’écrièrent-ils, nous l’ont promis ; c’est par toi que nous obtiendrons notre subsistance. » Prithou, ainsi pressé par les mortels qui l’entourent, tâche de condescendre à leurs désirs. Il prend son arc et ses flèches, et violente la Terre. Celle-ci effrayée fuit devant le fils de Véna, et se change en vache[2]. Prithou, l’arc à la main, poursuit la fugitive qui, poussée par sa crainte, parcourt tous ces mondes, où régnent Brahmâ et les autres dieux[3]. Mais toujours elle aperçoit le fils de Véna, tenant son arc tendu, et la menaçant de ses flèches aiguës et brillantes : elle aperçoit Prithou, puissant par sa piété, magnanime et redoutable pour les dieux eux-

  1. Le Mâgadha est devenu aussi célèbre par ses princes que par ses poëtes. Ces derniers ont porté le nom général de Mâgadha.
  2. Le lecteur pourra comparer cette fable avec celle de la vache Io. Dans les Lois de Manou, lect. ix, sl. 44, il est dit que l’histoire de Prithivî, la terre, est une allégorie.
  3. Ces mots désignent sans doute les diverses régions du globe, d’aprés leur position géographique ; car le monde de Brahmâ est situé vers le pôle. La Terre changée en vache me semble indiquer la vie pastorale des anciens. Prithou voulut y ajouter l’agriculture, et il éprouva d’abord de la résistance. Je suppose qu’il fut, dans le commencement, obligé d’employer pour cela la violence. C’est là tourmenter, d’après le langage poétique, la terre qu’il doit protéger, et qui bientôt, sous sa tutelle pacifique, deviendra féconde par le bienfait de l’agriculture.