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anecdotes pathétiques et plaisantes

Un magnifique panorama de Paris se déroulait devant nous.

— Fss ! fss ! fss !… siffla le nègre qui admirait.

— C’est beau, n’est-ce pas ?

Mais Amadou s’était ressaisi. Il avoua seulement :

— Grand village.

Et comme je lui proposais de visiter ce « grand village » :

— Moi pas vouloir. Les blancs dire : « Il est noir, il est noir. » Amadou n’aime pas entendre. Si toi tu viens à Dakar, les noirs te regarder aussi, te montrer et dire : « Boula, boula. »

— Alors, Amadou, tu ne resteras pas à Paris après la guerre ?

— Fss ! fss !… et mon femme !

Le tirailleur sénégalais n’a qu’une idée : retourner au feu pour en finir avec les Boches. Puis il rentrera fièrement à Dakar où l’attend Mme Amadou.


Le récit du tirailleur.

Le tirailleur algérien Ali ben Moktar est en traitement dans un hôpital auxiliaire de Paris. Ces jours-ci, il obtenait une permission de quelques heures pour aller se balader dans Paris. Il fut accosté sur les boulevards par quelques Parisiens qui, après s’être enquis des nouvelles de sa santé, le mirent au courant de l’œuvre de la flotte anglo-française dans les Dardanelles.

Traînant sa jambe et appuyé sur une forte canne, Ali rentra, tout joyeux, le soir, à l’hôpital, où ses camarades lui demandèrent ce qu’il avait vu et appris.

— Mon vio, dit Ali, le sultan de Stamboul, citte saloberie qui l’a voli marchi fic li Boches, il i foti.

— Comment ça, lui demanda un zouave, raconte vite.

— Oh ! ji raconti bien, va. Voilà : l’iscouade dis Anglis et di Francis grib (bientôt) il rentri à Stamboul,