Page:Langlois - Anecdotes pathétiques et plaisantes, 1915.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.
26
anecdotes pathétiques et plaisantes

d’abord à reculons, puis, prenant leur courage à deux mains, firent demi-tour et s’éloignèrent précipitamment, non sans regarder souvent par derrière pour voir si les autres tenaient bien leur parole.

Depuis ce jour, jamais plus un soldat français ne descendit au fond du ravin pour prendre de l’eau, et l’on peut croire qu’il en fut de même du côté allemand.


Comment, à cause d’un briquet, fut enlevée une tranchée allemande.


Ce soir-là, dans la tranchée avancée, prés de Reims, nos soldats, confortablement installés, fument leur pipe après la soupe. Soudain, comme presque toujours, à la nuit tombée, un Boche arrive en rampant.

— Nous n’avons pas de quoi allumer notre tabac, prêtez-nous des allumettes.

— Tiens, dit l’un des nôtres, voilà un briquet, mais ne le faites pas « péter ».

Le Boche s’en va. Nos troupiers continuent de blaguer, et puis on s’endort. La nuit est longue. Les soldats se réveillent, et celui qui prêta son briquet s’écrie en s’étirant un peu :

— Faut que j’aille leur réclamer mon amadou aux têtes pointues, ils ne se pressent pas de le rapporter.

Et voilà deux fantassins qui s’en vont à leur tour jusqu’aux tranchées ennemies ;

— Hé ! là, et notre briquet ?

Nicht, répond un Boche.

— Vous ne voulez pas le rendre ?

Et il fallait entendre, comme nous l’avons entendu de la bouche du blessé qui racontait cette histoire, avec quelle voix coléreuse notre fantassin posa la question.

Les Boches éclatent d’un rire insultant pour nos deux troupiers, dont l’un saisit un Allemand, le pêche plutôt par le collet, tandis que l’autre tient les ennemis en respect. Et nos soldats s’en vont vers nos abris avec leur prisonnier, cependant que les Boches tirent sur eux.