Page:Langevin - La Pensée et l'action, 1950.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le retentissement de cette fière déclaration est si grand que les organisateurs du premier meeting de solidarité avec les marins de la mer Noire demandent naturellement à Paul Langevin de présider la réunion. Pour avoir sauvé l’honneur et d’autorité morale du peuple de notre pays devant l’État soviétique nouveau, sans l’alliance duquel la sécurité durable de la France devait s’avérer un leurre, pour avoir accompli un acte d’une portée nationale incalculable, ces marins avaient été condamnés. Paul Langevin dégage immédiatement les données exactes d’un problème que tant de passions et d’ignorances contribuaient alors à rendre obscur pour beaucoup d’intellectuels : il s’en va à la salle Wagram présider le meeting pour la libération des emprisonnés. Sur le seuil, où l’attendaient Ferdinand Buisson et le père de Marcel Prenant, le professeur Auguste Prenant, membre de l’Académie de Médecine, il fut accueilli par le militant communiste Daniel Renoult qui devait, comme lui, plus tard, subir les persécutions hitlériennes et, comme lui, y faire face vaillamment.


Qui de nous ne se rappelle, s’écriait Langevin à Wagram, les émotions du début de la révolution russe, cette première réalisation des espoirs de Libération universelle, pour laquelle tant de jeunes hommes avaient déjà librement et presque joyeusement consenti à mourir ?


Il caractérisait les marins de la mer Noire comme « les meilleurs éléments de la nation ». En ce jour et en ce lieu, s’associant à l’action de leurs défenseurs, Paul Langevin faisait ses premières armes comme compagnon de lutte des hommes dont il devait devenir le camarade de parti, au terme d’un développement qui exprime la logique même du mouvement démocratique en notre temps. De la lutte avec Jaurès en 1900 à l’amitié chaleureuse et confiante de Maurice Thorez quarante ans plus tard, Paul Langevin est devenu de plus en plus fidèle au meilleur de lui-même.