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SOUVENIRS POLITIQUES

Mercier s’était déjà fait une belle réputation en Chambre pendant le peu de temps qu’il y avait occupé un siège. On connaissait ses qualités, son intelligence, son courage, son éloquence. Dans le barreau de St-Hyacinthe où il avait exercé sa profession, il avait obtenu de brillants succès, surtout aux assises criminelles. Il avait eu plusieurs procès retentissants, et, il fallait le voir devant la cour ! Il s’agitait, il dominait toute la scène et finalement il escamotait jurés, juges et adversaires dans les plis de sa toge. Il courait droit au but avec la vitesse d’une charge de cavalerie. Cet homme était né pour le commandement et avait toutes les qualités d’un chef parlementaire : il avait la bonhomie et le magnétisme ; son éloquence avait plus de ce qui désarme que de ce qui blesse.

La vie intérieure des assemblées parlementaires est discrète : c’est là que se font ou se défont les majorités, que les influences se dessinent, que les réputations se jugent, que les décisions sont prises. Souvent, entre hommes que tout sépare, la poignée de main banale fait un jour un premier lien : puis les regards se croisent, le cigare s’offre et s’allume, les confidences s’échangent et à la fin, les pactes se concluent. Personne ne comprenait cela mieux que Mercier. Que de députés conservateurs il a ébranlé par ses conver-