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qui est réellement empirique, mais à la métaphysique qui peut s’être insinuée dans la discussion ou au côté purement logique de la conclusion et de la formation du concept. À quoi bon, par conséquent, la comparaison des rapports des sciences de la nature à la philosophie avec l’attitude de la philosophie en face du dogme des théologiens ? Si l’on veut indiquer ainsi la nécessité d’une nouvelle émancipation, nous avons devant nous un violent anachronisme. Il est parfaitement clair que la philosophie ne doit nullement se régler sur ces dogmes. Au contraire, elle revendiquera toujours le droit d’examiner ces dogmes, comme objets de ses recherches. Le dogme n’est pas pour le philosophe une thèse de la science de la nature, mais l’expression des tendances de la foi et de l’activité spéculative d’une période de l’histoire. Il doit chercher comprendre la naissance et la disparition des dogmes dans la connexion avec le développement historique de la culture humaine, s’il veut pouvoir s’acquitter de sa tâche sur ce terrain. »

« Enfin, il faut que les recherches exactes soient le pain quotidien de tout philosophe. Quand même l’empirique se retirerait, par fierté, sur son domaine spécial, il ne pourra jamais empêcher le philosophe de l’y suivre. Actuellement une philosophie ne se conçoit plus sans recherches exactes ; de leur côté, les recherches exactes ont continuellement besoin d’être élucidées par la critique philosophique. Le philosophe ne fait pas de dilettantisme, quand il se familiarise avec les résultats les plus importants et avec les méthodes de recherches de toutes les sciences de la nature ; car cette étude est la base nécessaire de toutes ses opérations. De même, le naturaliste ne fait pas de dilettantisme, quand il se forme une opinion exacte, fondée sur l’histoire et la critique, relativement au processus de la pensée humaine, auquel il se rattache indissolublement, malgré l’apparente objectivité de ses recherches et de ses conclusions. Mais nous appellerions dilettantisme condamnable (sans nier d’ailleurs que des intelligences privilégiées puissent réellement embrasser les deux domaines) le fait d’un philosophe qui, à la manière de Bacon, avec un esprit insuffisamment préparé et avec une main peu exercée, bâcle des expériences à tort et à travers, aussi bien que le fait d’un naturaliste qui, sans se préoccuper de ce que l’on a pensé et dit avant lui, bouleverse tous les concepts traditionnels pour se façonner au hasard un système de métaphysique, »

Mais il n’est pas moins vrai que le philosophe et le naturaliste peuvent s’entraider avec succès, quand ils se transportent sur le terrain qui leur est et doit leur rester commun à tous deux : la critique des matériaux des recherches exactes, relativement aux déductions possibles. En supposant que des deux côtés on se serve d’une logique