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rience ; il doit être quelque chose de mental. ») Ce passage, dans lequel Mill prétend reproduire la pensée de Whewell a évidemment conduit le Dr Cohen dans Kant’s Theorie der Erfahrung, p. 96 (où d’ailleurs il expose avec une rare clarté les rapports de Mill avec Kant), à prêter à Whewell une théorie analogue à celle de Leibnitz (ibid., p. 95) que Mill combattit avec raison. Or il n’est pas question de cela ; l’expression « quelque chose de mental (something mental), qui ressemblerait entièrement à cela, a été prêtée par Mill à Whewell ; aussi ne faut-il pas traduire imaginary looking par « vue imaginaire », mais par vision en l’imagination. D’ailleurs, dans ce passage (I, 130), Whewell ne songe même pas à distinguer nettement la vision en imagination d’avec la vue réelle ; il dit plutôt en termes exprès : « If we arrange fifteen things in five rows of three, it is seen by looking or by imaginary looking, which is intuition, that they may also be taken as three rows of five. » (« Si nous disposons quinze objets en cinq rangées de trois, la vue réelle ou la vision en imagination c’est-à-dire l’intuition, s’aperçoit très-bien que ces objets peuvent aussi être considérés comme formant trois rangées de cinq. ») À la vue réelle et à la vision en imagination est donc expressément attribuée la même importance pour le processus de la connaissance. Whewell est ainsi kantien pur, du moins sur ce point, ce que nous faisons remarquer avec d’autant plus de plaisir que, induit en erreur, nous aussi, par Mill, nous avions méconnu ce fait, dans la première édition.

11 [page 26]. Voir Cohen, Kant’s Theorie der Erfahrung, p. 95, où à l’énonciation de Mill que l’axiome : deux lignes droites ne peuvent circonscrire un espace est « une induction qui s’appuie sur une démonstration sensible » sont ajoutés ces mots « ceci est absolument kantien. »

21 [page 26]. Cohen, Kant’s Theorie der Erfahrung, p. 96, remarque : « Mais si l’on vient demander d’où « savons »-nous et pouvons-nous savoir que les lignes réelles ressemblent parfaitement aux lignes imaginaires, Mill répond : il n’y a par le fait aucune certitude pour la mathématique. Mais par là il rétracte ses démonstrations de l’évidence de cette science. »

13 [page 27]. Sitzungberichte der Wiener Akademie, philosophish-historische Klasse, 67 Band, 1871, p. 7 et suiv.

14 [page 28]. Aussi Leibnitz s’occupait-il déjà de la réduction des atomes à certains concepts généraux de l’espace. Voir sa dissertation « In Euklidis πρῶτα » in Leibnitzens mathematischen Schriften, herausgegeben von Gerhardt, zweite Abtheilung, erster Band citée dans la critique d’Ueberweg, rentrant complètement dans la question critique, relative aux Prolégomènes philosophiques de la géométrie de Delboeuf, Liège 1860, im 37 Bande der Zeitschrift für Philosophie und philo-