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sens telles que la couleur, le son, etc., ne méritent peut-être pas d’être rejetées aussi absolument comme quelque chose d’individuel, comme quelque chose de subjectif, d’où ne peuvent découler des propositions a priori, et d’où par conséquent ne peut sortir aucune objectivité. En premier lieu, on hésite devant la proposition, par laquelle Kant veut démontrer que la forme ordonnatrice doit être l’a priori ; devant la proposition, d’après laquelle une sensation ne pourrait se coordonner régulièrement à une autre sensation. Parmi les débuts chétifs d’une future psychologie scientifique, se trouve une proposition qui nous apprend que — dans les limites habituelles — la sensation grandit avec le logarithme de l’excitation correspondante, la formule x = log. y, que Fechner a donnée pour base à sa psychophysique comme « loi de Weber ». Il est vraisemblable que cette loi a sa source dans la conscience elle-même, et non dans les faits psychophysiques qui séparent l’excitation extérieure (physique) et l’acte de devenir conscient (27). On peut donc, sans faire violence à la chose (les mots doivent obéir), distinguer entre la quantité de sensation (y) qui fait irruption dans la conscience et la quantité (x) reçue par la conscience. En vertu de cette hypothèse, les formules mathématiques, auxquelles nous sommes conduits par une recherche exacte, n’énoncent en réalité qu’une chose : la quantité de sensation qui, à chaque instant, fait irruption, est l’unité au moyen de laquelle la conscience mesure chaque fois le degré de l’augmentation qu’elle peut recevoir.

De même que l’on peut bien mesurer l’intensité d’une sensation en la comparant à une autre sensation, de même aussi la sensation peut se coordonner, au point de vue de la juxtaposition, avec les sensations que l’on a déjà éprouvées. Des faits nombreux prouvent que les sensations ne se groupent pas d’après une forme toute préparée, l’idée d’espace, mais qu’au contraire, l’idée d’espace est elle-même déterminée par nos sensations. Une ligne composée de nombreuses