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ques les plus compliquées. Telle serait la voie à suivre.

Où est l’empêchement ? Est-ce le manque d’esprit d’invention ou de dextérité pour les expériences les plus difficiles ? Assurément non. Mais on ne veut pas comprendre que, pour expliquer la vie de l’âme, il faut revenir à des faits isolés qui constituent une partie nécessaire du mécanisme, mais diffèrent totalement de l’action d’un organisme complet.

Or le mouvement réflexe s’opère sans conscience ; ainsi l’activité même la plus compliquée en ce genre ne peut expliquer la conscience

Autre objection provenant du préjugé le plus grossier. Pour prouver que la conscience n’existe que dans le cerveau, Moleschott cite l’observation célèbre de Jobert de Lamballe : une jeune fille blessée dans la partie supérieure de la moelle épinière eut encore conscience de son état pendant une demi-heure, bien qu’à l’exception de la tête tout son corps fût paralysé. « Ainsi toute la moelle épinière peut être rendue inerte, sans que la conscience en souffre. » Soit ; mais, en concluant de ce fait que des animaux décapités n’ont aucun sentiment et aucune conscience, Moleschott oublie que la tête, séparée de la moelle épinière, pouvait nous faire connaître sa conscience d’une manière intelligible pour l’homme, mais non le tronc. Nous ne pouvons absolument pas savoir ce qui peut rester ou non de sentiment et de conscience dans les centres de la moelle épinière séparés de la tête. Nous pouvons seulement admettre avec certitude que cette conscience ne pourra rien faire qui ne soit fondésur les conditions mécaniques de la direction centripète et centrifuge des nerfs ainsi que sur celles de l’organisation du centre.

On ne peut non plus conclure par conséquent les centres de la moelle épinière sentent et peuvent, par suite, faire plus que ne le pourrait un simple mécanisme. Au contraire, la chose se passe d’une manière strictement mécanique, c’est ce que l’on peut établir a priori et ce que démontre encore