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cette expérience assez souvent pour que l’association des idées et l’habitude fixent en moi la conviction, ou bien il faut que je procède à des expériences systématiques pour savoir si le résultat ne serait pas tout à coup différent avec des corps différents, avec un placement autre de ces corps ou avec des circonstances particulières. La généralisation rapide et absolue de ce qu’on a vu une fois ne peut s’expliquer simplement par l’évidente uniformité de toutes les relations numériques. Si les propositions de l’arithmétique et de l’algèbre étaient des propositions expérimentales, on n’acquerrait qu’en dernier lieu la conviction que tous les rapports numériques sont indépendants de la structure et de l’arrangement des corps comptés, l’induction donnant toujours les propositions générales plus tard que les propositions particulières. La proposition que les rapports numériques sont indépendants de la nature des objets comptés est plutôt elle-même une vérité a priori. Il est aisé de prouver qu’elle est, en outre, synthétique. On pourrait lui ôter sa nature synthétique, si on la comprenait dans la définition de ce que je veux entendre par nombres. Il en résulterait immédiatement une algèbre complète en soi, mais nous ne saurions nullement si elle est applicable aux objets. Or chacun peut savoir que notre conviction de la vérité de l’algèbre et de l’arithmétique implique en même temps la conviction qu’elles s’appliquent à tous les corps qui peuvent s’offrir à nous. Le fait que les objets de la nature, quand il s’agit non de les compter un à un ou dans leurs parties, mais de les mesurer et de les peser, ne peuvent jamais correspondre exactement à des nombres déterminés et sont tous incommensurables, ce fait ne change rien à ce que nous venons de dire. Les nombres sont applicables à tout objet avec un degré quelconque de précision.

Nous sommes convaincus qu’une barre de fer, soumise continuellement aux variations de la température, a, dans un espace de temps infiniment court, une dimension appré-