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priétés elles-mêmes des éléments chimiques ne sont que des formes déterminées, revenant d’une manière régulière dans les mêmes circonstances, du mouvement général et essentiellement uniforme de la matière. Pour peu que l’on regarde par exemple les éléments chimiques comme de simples modifications d’une matière primitive, homogène, cette dernière hypothèse se comprend sans peine. Il est vrai que la loi de la conservation de la force, dans cette théorie la plus stricte et la plus logique, n’est rien moinsque démontrée. Ce n’est qu’un « idéal de la raison » ; mais, comme cet idéal est le but suprême de toute recherche empirique, nous ne pouvons guère nous en passer. On peut même affirmer que, dans le sens le plus large, cette loi serait en droit de revendiquer la valeur d’un axiome. Ainsi tomberait le dernier reste de l’indépendance et de la domination de la matière.

Pourquoi, dans ce sens, la loi de la conservation de la force a-t-elle une bien plus grande importance que la loi de la conservation de la matière, que déjà Démocrite posait comme axiome et qui, sous le nom « d’immortalité de la matière », joue encore un rôle si considérable chez les matérialistes actuels ?

La réponse à cette question est que, dans l’état actuel des sciences physiques et naturelles, la matière est partout l’inconnu ; la force, partout le connu. Si, au lieu de force, on aime mieux dire « propriété de la matière » qu’on prenne garde de tourner dans un cercle vicieux ! Une chose nous est connue par ses propriétés ; un sujet est déterminé par ses attributs. Or la « chose » n’est, en réalité, que le point de repos désiré par notre pensée. Nous ne connaissons que les propriétés et leur réunion dans un inconnu, dont l’hypothèse est une fiction de notre esprit, mais à ce qu’il semble une fiction nécessaire et impérieusement exigée par notre organisation.

La célèbre « particule de fer » de Dubois, laquelle est incontestablement la même « chose », soit qu’elle parcoure