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dans les écoles. À défaut de verve, ils avaient du moins un but et de la bonne volonté, en attendant l’apparition d’une génération élevée au milieu des excitations passionnées de la jeunesse. Chez presque tous les poëtes remarquables, qui précédèrent immédiatement l’époque classique, comme Uz, Gleim, Hagedorn etc., on peut constater l’influence de l’école (107). Ici on faisait des vers allemands, là on lisait des auteurs grecs ; mais l’esprit d’où sortaient ces deux tendances était le même ; et le rénovateur le plus influent des vieilles études classiques dans les gymnases, Jean Mathias Gesner, était en même temps un ami de la vie réelle et un zélé promoteur de la langue allemande. Leibnitz et Thomasius n’avaient pas en vain appelé l’attention sur le profit que d’autres nations retiraient de la culture de leur langue maternelle (108). Thomasius avait été forcé de livrer des combats acharnés pour obtenir l’emploi de l’allemand comme langue des cours universitaires et des traités scientifiques ; cette cause triompha peu à peu au XVIIIe siècle, et même le timide Wolff, en se servant de l’idiome national dans ses écrits philosophiques, développa l’enthousiasme naissant pour la nationalité allemande,

Chose étrange, des hommes sans vocation poétique durent préparer l’essor de la poésie ; des savants au caractère pédantesque et au goût corrompu mirent les esprits en état d’entendre la simplicité noble et les types de la liberté humaine (109). Le souvenir, presque oublié, de la splendeur de l’ancienne littérature classique poussa les esprits vers un idéal de beauté, dont ni les chercheurs ni leurs guides n’avaient une idée exacte, jusqu’au moment ou Winckelmann et Lessing firent jaillir la lumière. Le désir de se rapprocher des Grecs par l’éducation et la science avait surgi dès les commencements du XVIIIe siècle sur des points isolés ; ce désir avait grandi de décade en décade, lorsqu’enfin Schiller, par la profondeur de ses analyses, sépara, d’une manière rationnelle, le génie moderne du génie antique ; en