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Angleterre, il reconnaissait tous les articles de foi de l’Église anglicane. De la Mettrie, qui osa parler, mais non sans amhages et sans équivoques, ne consacra ses efforts qu’au matérialisme anthropologique ; d’HoIbach, le premier, parut attacher la plus grande importance aux thèses cosmologiques. Il est vrai qu’en y regardant de plus près, on remarque facilement qu’ici, comme chez Épicure, ce sont principalement des vues pratiques qui dirigent d’Holbach. Considérant la religion comme la source principale de toute corruption humaine, il s’efforce d’extirper ce penchant maladif de l’humanité jusque dans ses dernières racines ; aussi fait-il la guerre aux conceptions déistes et panthéistes de Dieu, si chères à ses contemporains, avec autant d’ardeur qu’aux idées de l’Église. C’est sans doute cette circonstance qui suscita, même parmi les libres-penseurs, de si violents ennemis contre le Système de la nature.

Les chapitres dirigés contre l’existence de la divinité sont pour la plupart fort ennuyeux. Les arguments au moyen desquels la logique veut démontrer l’existence de Dieu, sont d’ordinaire si faibles, si nébuleux, qu’en les admettant ou en les rejetant, on prouve simplement que l’on est plus ou moins disposé à se faire illusion à soi-même. Celui qui se contente de pareilles démonstrations ne fait que donner une expression scholastique à son désir d’admettre un dieu. Ce désir même, longtemps avant que Kant entrât dans cette voie pour établir l’idée de Dieu, n’émana jamais que de l’activité pratique de l’esprit ou de la vie de l’âme, mais non de la philosophie théorique. L’amour scholastique des discussions inutiles peut assurément trouver à se satisfaire, quand la discussion roule sur les propositions suivantes : « l’être existant par lui-même doit être infini et avoir l’ubiquité », ou « l’être nécessairement existant est nécessairement unique » ; mais des idées si vagues ne sauraient donner matière à un travail d’esprit sérieux et digne d’un homme. Que dire maintenant, quand un penseur comme d’Holbach consacre près de cinquante