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haute vérité, comme la suprême certitude. Les inspirations de la foi métaphysique voient alors leur vérité mesurée au rapport qu’elles ont avec notre besoin moral ; et la science, avec son hypothèse mécaniste, doit, à son tour, sa vérité et son prix à ce qu’elle est l’instrument nécessaire du commerce des intelligences, la condition sine qua non de l’ordre moral des esprits. C’est à la lumière supérieure de la conscience morale que, comme Kant et plus encore comme Fichte, Lange se hasarde, en passant sans doute, mais avec une foi entière, que ne connaissent pas l’ironie critique et le scepticisme indifférent de Vaihinger, à des hypothèses sur le fond dernier de la réalité, sur le monde des choses en soi, qui rappellent, nous l’avons montré, celle des métaphysiciens les plus hardis.

Et il semble bien que les inspirations métaphysiques de ce dogmatisme moral dominent au fond la doctrine de Lange ; et qu’on serait injuste envers sa pensée, en insistant trop longtemps sur les contradictions de détail, sur les conséquences sceptiques que nous avons dû relever. Ce n’en est pas moins un grave reproche à faire à un philosophe, qui excelle si bien à critiquer les autres, que d’être obligé de tenir moins compte de ses affirmations expresses que de ses tendances morales. Sous cette réserve, nous accordons volontiers à Lange le bénéfice de son dogmatisme moral. Nous croyons que la métaphysique de Fichte, commentée et agrandie par les récentes découvertes de la science, pourrait bien être, au fond, le dernier mot de sa philosophie.

L’unité du système ne peut donc être maintenue qu’à condition que Lange supprime le divorce de la raison théorique et de la raison pratique ; qu’il se décide à subordonner la