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lisme adopté (39) par Ueberweg dans la philosophie ésotérique des dernières années de sa vie.

Examinons maintenant l’influence que le matérialisme anglais a exercée sur l’Allemagne. Mais un mot d’abord sur ce que l’Allemagne avait pu produire d’original dans cette direction. Nous y trouverons bien peu de chose ; non qu’un ardent idéalisme ait exclusivement dominé dans ce pays, mais parce que la sève nationale avait été épuisée par les grandes luttes de la Réforme, les bouleversements politiques et une démoralisation profonde. Pendant que toutes les autres nations s’épanouissaient sous le souffle fortifiant de leur jeune liberté de pensée, on eût dit que l’Allemagne avait succombé en combattant pour cette même liberté. Nulle part le dogmatisme pétrifié ne paraissait plus borné que chez les protestants allemands. Avant tout, les sciences de la nature eurent un rude assaut à soutenir. « Le clergé protestant s’opposa à l’adoption du calendrier grégorien uniquement parce que cette réforme provenait de l’initiative de l’Église catholique. Il était dit dans la décision du sénat de Tubingue (24 novembre 1583) que le Christ ne pouvait marcher d’accord avec Bélial et l’antechrist. Kepler, le grand réformateur de l’astronomie, fut invité par le consistoire de Stuttgart (25 sept. 1619) à dominer son naturel téméraire, à se régler en toutes choses sur la parole de Dieu et à ne pas embrouiller le Testament et l’Église du Christ par ses subtilités, ses scrupules et ses gloses inutiles (40). »

Le professeur de Wittenberg, Sennert, paraît avoir fait une exception en introduisant l’atomistique chez les physiciens allemands ; mais cette innovation ne profita pas beaucoup à la physique, et l’on ne sut y rattacher aucune conception de la nature qui se rapprochât plus ou moins du matérialisme. Zeller dit, il est vrai, que les physiciens allemands conservèrent longtemps l’atomistique, « à peu près telle que Démocrite l’avait conçue, en telle estime que,