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ciale, extérieure, matérielle et proportionnelle (81). »

On ne saurait demander une plus grande clarté. Toland regarde évidemment la pensée comme un phénomène concomitant, inhérent aux mouvements matériels du système nerveux, à peu près comme la lumière qui suit un courant galvanique. Les mouvements volontaires sont des mouvements de la matière, qui se produisent d’après les mêmes lois que tous les autres, mais seulement dans des appareils plus compliqués.

Quand après cela Toland se retranche derrière une assertion bien plus générale de Newton et finit par protester contre l’opinion de ceux qui croiraient que son système rend inutile une raison directrice, nous sommes forcés de nous rappeler sa distinction entre la doctrine exotérique et la doctrine ésotérique. Le Pantheistikon, publié sans nom d’auteur et pouvant être regardé comme ésotérique, ne révère aucune âme du monde transcendante, quelle qu’elle soit, mais seulement l’univers dans son unité invariable d’esprit et de matière. En tout cas, nous pouvons déduire de la conclusion dernière de la plus remarquable de ses lettres que Toland ne voit pas, comme les matérialistes de l’antiquité, dans le monde actuel, le produit du hasard et de la répétition infinie d’essais imparfaits ; il croit au contraire qu’une finalité grandiose et immuable régit tout l’univers (82).

Toland est un de ces phénomènes qu’on aime à contempler : il nous découvre en lui une personnalité importante dans laquelle se fondent harmonieusement toutes les perfections humaines. Après une existence agitée, il put jouir avec une entière sérénité d’âme, du calme et de la solitude de la vie des champs. À peine quinquagénaire, il fut atteint d’une maladie qu’il supporta avec la fermeté du sage. Peu de jours avant sa mort, il composa son épitaphe, prit congé de ses amis, et sa remarquable intelligence s’éteignit paisiblement.