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monde ait besoin d’une élucidation ultérieure, elle ne pourra cependant jamais nous ramener en arrière. Lorsque Toland écrivit ses lettres, il y avait déjà plus d’un demi-siècle que l’on s’était habitué à l’atomistique de Gassendi ; la théorie des ondulations de Huyghens avait permis de sonder, dans ses profondeurs, la vie des plus petites molécules et, bien que Priestley ne découvrit l’oxygène que soixante-dix ans plus tard, constituant ainsi le premier anneau de la chaîne indéfinie des phénomènes chimiques, l’expérience avait néanmoins constaté la vie de la matière jusque dans ses plus petites molécules. Newton, dont Toland ne parle jamais qu’avec un grand respect, avait sans doute laissé à la matière sa passivité en admettant le choc primitif et en ayant la faiblesse de supposer l’intervention du Créateur à certains intervalles pour régulariser le mouvement de sa machine du monde ; mais l’idée de l’attraction comme propriété inhérente à toute matière fit rejeter bientôt le vain ajustement sous lequel Newton, trop préoccupé de théologie, avait imaginé de la présenter. Le monde de la gravitation vivait par lui-même, et il ne faut pas s’étonner que les libres-penseurs du XVIIIe siècle, Voltaire en tête, se regardassent comme les apôtres de la philosophie naturelle de Newton.

Toland, appuyé sur des propositions de Newton, va jusqu’à affirmer qu’aucun corps n’est dans l’état de repos absolu (79) ; bien plus, s’inspirant, avec une grande profondeur de pensée, de l’ancien nominalisme anglais, qui permit à ce peuple de faire un pas si considérable en avant dans la philosophie de la nature, il déclare que l’activité et la passivité, le repos et le mouvement sont des idées simplement relatives, tandis que l’activité éternellement inhérente à la matière opère avec une énergie égale, quand elle retient un corps dans un repos relatif vis à vis d’autres forces, ou quand elle lui imprime un mouvement accéléré.

« Tout mouvement est passif par rapport au corps qui donne l’impulsion et actif par rapport au corps dont ce mou-