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les propriétaires de la nature (17). » On pourrait sans doute faire remarquer que tout cela a déjà été dit d’une façon plus incisive, par Bacon, de qui Hobbes avait dès sa jeunesse étudié et approfondi la doctrine, mais cette concordance ne concerne que la tendance générale, tandis que la méthode de Descartes diffère, sur un point essentiel, de celle de Bacon.

Bacon débute par l’induction ; il croit qu’en s’élevant de l’individualité à la généralité, il arrivera immédiatement aux causes réelles des phénomènes. Ce résultat une fois obtenu, il emploie la déduction, soit pour compléter l’édifice, soit pour utiliser les vérités découvertes.

Descartes, au contraire, procède synthétiquement, mais non dans le sens de Platon et d’Aristote, et sans réclamer une certitude absolue pour les principes (ce revirement était réservé au développement réactionnaire de sa métaphysique !) ; mais il a la ferme conviction que la véritable force de la démonstration appartient à l’expérience. Il place la théorie en avant, par forme d’essai, explique par elle les phénomènes ; puis, grâce à l’expérience, il apprécie la justesse de la théorie (18). Cette méthode, que l’on peut appeler hypothétique et déductive, bien que le nervus probandi en doive être cherché dans l’induction et qu’il faille en parler à propos de la logique inductive, est plus rapprochée que celle de Bacon, du véritable procédé de ceux qui étudient la nature. Cependant aucun des deux n’expose complètement le mode des recherches naturelles. Mais, sans aucun doute, Hobbes s’est ici déclaré sciemment en faveur de Descartes contre Bacon, tandis que plus tard Newton (il est vrai plus en théorie qu’en pratique) revint à Bacon.

On doit de grands éloges à Hobbes pour avoir, tout en suivant sa propre voie, reconnu franchement et sans restrictions les importants résultats acquis par l’étude moderne de la nature. Tandis que Bacon et Descartes en étaient encore à renier Copernic, Hobbes lui assigna la place d’honneur