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à identifier la grammaire et la logique avec Trendelenburg, K.-F. Becker et Ueberweg, pourrait d’ailleurs étudier avec profit les logiciens de cette époque-là ; car ils entreprirent sérieusement d’analyser toute la grammaire d’une façon rationnelle. Le résultat de leurs efforts fut de créer une langue nouvelle, dont la barbarie fit jeter les hauts cris aux humanistes.

Chez Aristote, l’identification de la grammaire et de la logique est encore naïve parce que, comme Trendelenburg l’a fait remarquer avec beaucoup de justesse, ces deux sciences sortent chez lui d’une même tige. Aristote présente déjà des vues lumineuses sur la différence du mot et de l’idée, mais ces lueurs ne suffisent pas pour dissiper l’obscurité générale. Dans sa Logique, il n’est question que de sujet et d’attribut, ou, pour préciser, de substantif et de verbe, ou, au lieu de ce dernier, d’adjectif et de conjonction. Outre la négation, il y est traité des mots qui déterminent jusqu’à quel point l’attribut se rapporte au sujet, comme « tous », « quelques-uns » et de certaine verbes auxiliaires, qui expriment la modalité des jugements. Quand, au XIIIe siècle, la logique byzantine se répandit en Occident, elle y apporta les adverbes ; elle agrandit le rôle des verbes auxiliaires employés en logique ; elle émit des réflexions sur l’importance des cas dans les substantifs ; elle s’efforça aussi avant tout de faire disparaître les ambiguïtés qu’amène le nom dans ses rapports avec l’extension de l’idée qu’il représente. Ces ambiguïtés sont encore plus fréquentes en latin, où il n’y a pas d’article, que dans l’allemand, comme le prouve le cas célèbre de l’étudiant ivre, qui jurait n’avoir pas bu vinum, parce qu’il faisait une restriction mentale, et voulait affirmer qu’il n’avait pas bu le vin du monde entier ni spécialement celui de l’Inde ou celui qu’on avait versé dans le verre de son voisin. Ces sophismes appartenaient aux exercices logiques de la scolastique expirante, dont les excès en cela, comme les subtilités à propos des formes de