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Pour mesurer le mouvement, il faut qu’il change dans sa direction, mais non dans sa quantité : car si tout change en lui, rien ne peut se mesurer, et l’on manque de tout élément d’unité et d’ordre. Nous sommes forcés d’admettre, dans l’espace que remplit le mouvement, un principe indestructible et immuable : ce principe, c’est la matière. Comme la direction générale du mouvement nous paraît se ramener aux deux formes essentielles de l’attraction et de la répulsion, nous imaginerons partout juxtaposés dans l’espace des centres de forces indestructibles ; et, pour nous le représenter, des atomes, c’est-à-dire du plein et du vide. Les mouvements de la matière ainsi conçue devront être, à leur tour, régis par la loi de la causalité : c’est-à-dire qu’ils se produiront suivant des règles immuables, uniquement destinées à maintenir l’unité essentielle du mouvement, sous la multiplicité changeante de ses directions.

Tout se ramène donc pour le savant au mouvement. Le monde des faits n’est pour lui, suivant le mot de Descartes, qu’un immense mécanisme ; et la science, une mathématique universelle. La matière n’est pas autre chose que la quantité constante du mouvement ; le déterminisme mécanique ou la loi de la causalité n’exprime que la régularité de ses modifications. La science connaît seulement le mouvement et la matière ; car ce sont là les seuls objets vérifiables et modifiables partout. Chacun de nous a la notion du mouvement ; chacun est en état de le mesurer, de le produire lui-même.

Voilà, en traits rapides, ce qu’est et ce que veut la science.

Le savant doit s’interdire absolument la recherche des causes finales. « Tout se passe dans le monde des corps,