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l’année 342 ou au commencement de l’année 341. On raconte que, dans sa quatorzième année, un jour qu’il lisait à l’école la cosmogonie d’Hésiode, voyant que tout provenait du chaos, il demanda d’où provenait le chaos lui-même. Les réponses de ses maîtres n’avant pas été de nature à le satisfaire, le jeune Épicure commença dès lors à philosophie par lui-même et sans guide.

Et, de fait, Épicure peut être regardé comme autodidacte, quoique les principales idées qu’il combina dans son système fussent généralement connues, à les prendre une à une. Au point de vue encyclopédique, ses études préparatoires laissaient à désirer. Il ne s’attacha à aucune des écoles alors dominantes, mais il n’en étudia que plus ardemment les œuvres de Démocrite, qui le conduisirent au principe de sa conception du monde, à la théorie des atomes. À Santos déjà Nausiphane, partisan de Démocrite et penchant vers le scepticisme, lui aurait communiqué ces idées.

Quoi qu’il en soit, on ne saurait admettre qu’Épicure ait été autodidacte par ignorance des autres systèmes ; car, dès l’âge de dix-huit ans, il se rendit à Athènes et il est probable qu’il y suivit les cours de Xénocrate, disciple de Platon, tandis qu’Aristote, accusé d’impiété, attendait à Chalcis la fin de son existence.

Quelle différence entre la Grèce du temps d’Épicure et la Grèce à l’époque de l’enseignement de Protagoras, cent ans auparavant ! Alors, Athènes, la ville de la libre civilisation, avait atteint le faîte de sa puissance extérieure. Les arts et la littérature étaient en pleine floraison ; la philosophie, dans sa vigueur juvénile, allait jusqu’à la présomption. — Quand Épicure vint étudier dans Athènes, la liberté de cette ville se mourait.

Thèbes venait d’être détruite et Démosthlme vivait dans l’exil. Du fond de l’Asie retentissaient les nouvelles des victoires du Macédonien Alexandre ; les merveilles de l’Orient se révélaient et, en face des nouveaux horizons qui se décou-