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Traité populaire d’agriculture

mitée ; la prairie artificielle n’occupe le sol que pendant un petit nombre d’années.

Il est bien facile d’en trouver la raison.

La prairie artificielle, nous l’avons dit, ne se compose que de quelques plantes, annuelles ou vivaces, et encore, si les plantes sont vivaces, la prairie n’est-elle le plus souvent formée que d’une seule espèce. Seules ou en petit nombre, ces espèces sont toujours coupées avant la maturité de leurs semences, elles ne peuvent par conséquent se régénérer. Et, si l’on ajoute qu’elles ont bientôt épuisé les matières salines que leur offre le sol, on comprendra aisément que, même dans les conditions les plus favorables, la prairie artificielle doit avoir une courte durée.

Dans la prairie naturelle, les choses se passent tout autrement : formée d’un grand nombre de plantes mûrissant à des époques différentes, elle reçoit, avant d’être fauchée, les graines que les espèces hâtives laissent tomber sur le sol : c’est une véritable semence, annuellement reçue, qui, en reproduisant les espèces, prolonge la durée de la prairie. Les débris des feuilles, des tiges et des racines de toutes ces plantes, dont beaucoup vivent plus aux dépens de l’atmosphère que du sol, rendent à la terre plus d’éléments qu’elles n’y en ont puisé. Et d’ailleurs, un phénomène bien propre à faire durer les prairies naturelles, c’est que les plantes qui la composent y subissent une véritable rotation. Celles qui ne trouvent plus dans le sol les substances minérales propres à leur continuer la vie, disparaissent et donnent leur place à des espèces n’ayant pas les mêmes besoins, les mêmes exigences, pour reparaître plus tard lorsque le sol a retrouvé ces mêmes substances minérales dont elles ont besoin, et le sol les retrouve soit dans les débris laissés par les autres plantes, soit dans les engrais répandus à la