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aperçu que la morale était coextensive à la conduite, non moins nombreux sont ceux qui ont méconnu l’unité fondamentale de la morale, faisant de celle-ci une collection de préceptes sans lien. Cette nouvelle erreur a souvent la même origine que celle de tantôt : la morale traditionnelle, la morale religieuse sont composées, en effet, de règles qui se juxtaposent simplement, n’ayant rien de commun que la manière dont elles nous obligent et les sanctions qui les accompagnent ; et c’est sur le modèle de ces morales que beaucoup d’auteurs ont conçu la morale philosophique. Parfois cependant l’erreur qui nous occupe a une origine quelque peu différente : tel est le cas pour M. Rauh. Mais un certain rapport subsiste entre la conception de M. Rauh et celle des philosophes dont la doctrine a été influencée par la morale traditionnelle ou religieuse : si M. Rauh ne veut pas que l’on suspende toute la morale à un principe suprême, c’est parce qu’il pense que les croyances morales n’ont pas besoin d’être justifiées ; de même le sectateur de la morale traditionnelle ou de la morale religieuse croit que telle action est bonne, telle autre mauvaise, parce que cela est ainsi, parce que Dieu l’a ainsi voulu ; il ne remonte pas plus haut. Et j’ajouterai : ne sont-ce pas des croyances d’origine traditionnelle ou d’origine religieuse, en définitive, que ces croyances que M. Rauh nous engage à suivre ?

La morale rationnelle ne peut pas sans contradiction se réduire à une collection de préceptes sans lien, elle doit déterminer un principe suprême auquel toute la conduite sera subordonnée : ce qui le fait comprendre mieux que toute autre considération, c’est l’impossibi-