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lui-ci est un esprit libre, s’il n’a pas été guidé par la préoccupation d’aboutir à la justification d’une croyance préalable, d’un préjugé, cette pensée aura erré dans les directions les plus diverses, attirée successivement d’un côté et de l’autre par le hasard des lectures, par telles variations du ton affectif de la vie, ou par d’autres circonstances également fortuites. Et l’indication précise de tous ces flottements de la pensée ne saurait présenter, en soi, un grand intérêt. D’autre part l’élaboration d’une doctrine ne s’opère pas entièrement dans la pleine lumière de la conscience ; elle s’opère pour partie à l’insu du philosophe, qui se trouve tout à coup mis en possession de résultats inattendus, inespérés : c’est ainsi, même, que se font les progrès décisifs dans la découverte de la vérité, dans la coordination des idées. Mais alors, l’exposé de la formation d’une doctrine contiendra des hiatus : et comment un exposé pareil pourrait-il emporter la conviction du lecteur ?

C’est donc la méthode de l’exposition systématique qu’il faut nécessairement adopter. Toutefois, l’application n’en est pas aisée, loin de là, et cette application peut être faite de différentes façons. Cela tient au caractère particulier des problèmes que la philosophie a à résoudre. Dans ces problèmes les données ne sont pas, comme en géométrie par exemple, des éléments séparables et sépa-