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que l’enfant a pour ses parents et le chien pour son maître. Ce sera encore parce qu’on aime Dieu et qu’on se livre entièrement à lui[1]. Mais doit-on craindre Dieu, doit-on le vénérer, doit-on l’aimer, et doit-on subordonner sa conduite à ces sentiments de crainte, de vénération, d’amour ? c’est une question qu’on ne peut pas esquiver, et que la raison seule a qualité pour résoudre. Si la raison nous invite à prendre pour principe directeur de notre conduite la crainte ou l’amour de Dieu, alors, pour savoir comment nous devons nous comporter dans les diverses circonstances de la vie, il nous faudra nous en rapporter aux enseignements de la religion. Mais tout d’abord la raison doit se prononcer pour ou contre ce principe de la crainte ou de l’amour de Dieu.

En somme, la morale théologique n’est pas une morale complète ; elle est une « morale pratique » ; mais cette « morale pratique » doit s’appuyer sur une « morale théorique » que la religion, que la théologie ne nous fournit pas, que nous devons tirer de nous-mêmes. C’est en nous que nous trouvons ce besoin de pouvoir justifier nos actes qui donne naissance à la morale ; c’est en nous que sont les causes de nos actes ; et, par suite, c’est en nous, ce n’est qu’en nous que nous pouvons trouver la justification de ces actes. Loin que la constitution d’une morale rationnelle soit impossible, comme le veulent les théologiens, cette morale rationnelle est nécessaire pour fonder la morale théologique.

  1. Je ne reviens pas sur le cas, indiqué plus haut, de celui qui a plus de confiance dans la raison divine que dans la sienne propre.