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qu’elle n’est efficace que dans une certaine mesure : les croyances, les institutions ont leur racine dans les conditions d’existence des sociétés où elles vivent, dans toute une série de causes extérieures, et nullement rationnelles ; en sorte que le meilleur moyen d’agir sur elles, ce sera de modifier ces causes extérieures. La doctrine de MM. Simmel, Durkheim, Lévy-Bruhl et de leurs élèves nous enseigne encore à nous défier des systèmes moraux, qui sont trop souvent aventureux, dont les fondements n’ont pas été suffisamment éprouvés, qui s’appuient sur des prémisses incomplètes ou inexactes.

Enfin ces philosophes ont combattu avec raison la prétention que les moralistes ont eue à l’ordinaire, après avoir déterminé les principes ou le principe suprême de la conduite, de construire toute la morale, de dresser immédiatement le tableau complet des prescriptions que nous devrions suivre. C’est là ce que nos philosophes ont fait de plus utile, et j’ajoute que s’ils consentaient à ce qu’on interprétât leur doctrine de cette manière, à ce qu’on tînt leur critique pour dirigée uniquement contre la prétention que je viens de dire, il y aurait lieu de l’accepter sans réserve. Les moralistes ont cru le plus souvent que la « morale théorique » une fois établie, l’application des vérités de cette morale théorique aux situations et aux circonstances diverses de la vie ne supposait pas autre chose que la connaissance que tout le monde peut avoir de ces situations ou de ces circonstances. Au vrai, la connaissance vulgaire ne suffit pas ici ; la connaissance scientifique est requise. L’achèvement de la physiologie, de la psychologie, de la sociologie, seul, nous permettrait de voir