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morales ne pouvaient être que celles qui ont cours dans le milieu où nous vivons, si la critique et la réflexion n’avaient pas pour effet d’entamer les idées que nous avons reçues du dehors, si nous ne pouvions pas nous faire des idées morales personnelles, il serait parfaitement inutile, et il n’y aurait aucun motif de chercher autre chose que les croyances traditionnelles. Mais il n’en va pas ainsi, tant s’en faut. Et c’est pourquoi tout philosophe qui traite du problème de la pratique, s’il ne se borne pas à faire une œuvre simplement négative, est contraint d’avancer des principes moraux.

M. Lévy-Bruhl s’est trouvé dans ce cas. Et c’est en vain qu’il chercherait une dernière défense dans cette thèse qu’il soutient, que la morale d’une société est fonction des conditions d’existence de cette société, que cette morale est précisément ce que ces conditions exigent qu’elle soit. Le « principe des conditions d’existence » ne saurait fonder un optimisme parfait[1]. M. Lévy-Bruhl le reconnaît expressément : il avoue que l’ordre social, dont la morale est un des facteurs essentiels, est obtenu peut-être « par un égal dédain de ce que nous appelons économie et finalité », que peut-être il y a là « une prodigalité énorme, une dépense injustifiable de souffrances, de misères, de douleurs » de toutes sortes[2] ; et c’est avouer que la morale courante ne doit pas être tenue pour la meilleure, qu’il y a lieu de la corriger.

Quels principes M. Lévy-Bruhl proposera-t-il donc ?

  1. Pp 198-199 (7, § 2).
  2. Pp. 199-200.