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lité du perfectionnement moral, des individus, c’est pure chimère : de ceux-là mêmes des privilégiés qui se disent égalitaires et qui agissent politiquement dans le sens que je viens d’indiquer, de ceux-là mêmes il serait excessif d’exiger qu’ils mettent leur conduite pleinement d’accord avec leurs convictions ; voulant l’avènement de l’égalité, on peut, on doit comprendre qu’ils n’aient pas cet héroïsme de contribuer, par un renoncement spontané et individuel à leurs richesses, à diminuer cette inégalité qu’ils savent mauvaise.


Revenons à la question qui avait été posée plus haut ; demandons-nous s’il y a lieu dans la politique, concevant une certaine fin comme bonne, d’en réaliser cependant une autre, ou d’engager ses semblables à en poursuivre une autre. À cette question il conviendra parfois, ce semble, de donner — dans certains sens que l’on va voir — une réponse affirmative.

Tout d’abord il faut avoir soin en politique — puisqu’il est de l’essence de la politique de recourir à la contrainte — de tenir compte de ce mal que l’on produit chaque fois que l’on recourt à la contrainte. Un souverain, une assemblée ont le pouvoir d’effectuer une réforme qu’ils tiennent à juste titre pour bonne en soi : convient-il qu’ils décident cette réforme ? pas nécessairement. Diverses considérations doivent intervenir ici qui compliqueront le calcul — car il s’agit de simples complications — : il faudra penser que ce qui est imposé par la force est fragile, qu’à user de son pouvoir d’une certaine manière on encourage peut--