Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/123

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aucune liberté ne nous étant plus laissée, l’obligation perd son sens propre et cesse d’être.

Faut-il maintenant dénoncer les absurdités qui sont impliquées dans l’idée classique de l’obligation ? L’obligation est, d’une certaine manière, un principe extérieur à nous, puisqu’on refuse de l’assimiler aux forces psychiques naturelles. Et alors on est amené à concevoir que l’obligation existe même pour celui qui ne la sent pas, que c’est être immoral encore que de pécher sans le savoir, et que cela mérite un châtiment — lorsqu’on met la sanction à la suite de l’obligation — : conséquence absurde, que certains, comme Pascal, ont acceptée résolument pour rester dans la logique de leur doctrine, que d’autres au contraire ont essayé de rejeter, mais qu’ils n’ont pu rejeter qu’au moyen d’artifices faciles à percer.

Au vrai, si l’obligation est un principe transcendant, on ne voit pas quelle sorte d’autorité, quelle sorte de réalité elle possédera. Dans la mesure où l’obligation se fait sentir de moi, où elle contribue à déterminer ma conduite, je puis la considérer comme quelque chose de réel. Si l’on veut qu’elle dépasse l’influence qu’elle exerce, je n’aperçois pas ce qu’elle représente ; elle perd toute consistance, elle n’est plus qu’un fantôme.

Cette critique deviendra plus convaincante encore si, comme il est possible de faire, on recherche les causes qui ont donné naissance à l’idée de l’obligation et qui lui assurent l’empire qu’elle possède encore sur les esprits.

L’origine du sentiment de l’obligation a été étudiée par les philosophes évolutionnistes, notamment par Spencer ; ces philosophes ont montré que le sentiment