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notera, encore, que le besoin positif peut produire une peine en nous, non seulement si le plaisir que nous poursuivons vient à nous échapper, mais aussi si ce plaisir se fait trop attendre ; que dans certains cas — cela dépend des chances plus ou moins grandes que nous avons d’arriver à notre fin, et surtout de notre caractère plus ou moins impatient et inquiet — le besoin positif est douloureux ; et qu’ainsi la satisfaction de ce besoin pourra faire cesser une peine en même temps qu’elle nous procurera un plaisir.

2° Il y a des besoins impérieux, qu’il nous faut satisfaire sous peine de perdre la vie, ou tout au moins de subir de très graves dommages ; et il y en a qu’on peut sans grand inconvénient négliger de satisfaire. Les besoins de la première classe sont dits vitaux ou absolus quand ils expriment des nécessités vitales — on parle encore ici de besoins de conservation ou de besoins d’existence — ; dans un sens un peu plus large on parle de be soins primordiaux. Les autres besoins sont dits relatifs, ou secondaires. On constatera aisément que les besoins primordiaux sont négatifs, et que les autres peuvent être ou négatifs ou positifs.

3° Il y a des besoins urgents et des besoins non urgents. Le qualificatif « urgent », à la vérité, ne s’emploie guère qu’à propos de besoins négatifs, quand il s’agit de faire disparaître une peine présente ou de se préserver d’une peine dont on est menacé pour un moment très prochain ; et cependant il se présente aussi à nous des occasions prochaines de jouissance qui font naître en nous des besoins. De même on n’appelle urgents que ces besoins qui, sans être nécessairement primordiaux, ont cependant une certaine importance.

4° On peut opposer les besoins physiques et les besoins intellectuels et moraux. Mais il est à remarquer que ces deux catégories — si on donne aux mots leurs sens propres — n’embrassent pas tous les besoins. On prendra garde, en outre, de ne pas les identifier, comme il est fait souvent, à certaines autres catégories avec lesquelles elles ne coïncident pas. La catégorie des besoins intellectuels et moraux, par exemple, est plus étroite que celle des besoins de civilisation. Elle est plus étroite aussi que celle des besoins de perfectionnement : car notre perfectionnement n’est pas seule ment lié à la satisfaction de nos besoins intellectuels et moraux ; il y a aussi un perfectionnement physique. La catégorie des besoins physiques, d’autre part, est plus large que celle des besoins de conservation ou d’existence : il y a des besoins physiques dont la satisfaction n’est nullement nécessaire à notre conservation ; la nourriture elle-même ne nous est indispensable que jusqu’à concurrence d’une certaine quantité.

5° La plupart des besoins sont limités, ce qui signifie que la satisfaction de ces besoins peut aller jusqu’à la satiété. Mais il y a aussi des besoins qui sont pratiquement illimités : tel le besoin de luxe.

6° On peut distinguer les besoins en ordinaires et extraordinaires. Ces