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généralement des moyens de production. Et pour les autres revenus, on ne peut jamais les déterminer qu’autant qu’on connaît ceux-là : ainsi on ne pourra calculer la rente d’une terre que si l’on connaît, en même temps que la valeur des récoltes qu’elle donne, celle de la main-d’œuvre et du capital qu’il y faut employer.

Dans la question de la valeur des moyens de production, il est arrivé qu’on a vu des difficultés[1]. La valeur d’un moyen de production, a-t-on dit, dépend de la valeur de ce qu’il produit. Mais à l’ordinaire un moyen de production n’est pas employé isolément. Comment donc, lorsque plu sieurs moyens productifs seront combinés, si l’on peut ainsi dire, pour une même production, fera-t-on l’imputation à chacun d’eux de ce qui lui revient dans le produit ? Supposons plusieurs moyens productifs — de la main-d’œuvre, du capital, de la terre — employés ensemble à produire de certains biens de consommation. La valeur du produit est, par exemple, 12. Qu’est-ce qui revient, là-dessus, à la main-d’œuvre, au capital, à la terre ? Veut-on regarder ici ce que les trois moyens productifs produiraient, si on les employait isolément ? Mais ils ne produiraient plus rien du tout. Veut-on regarder ce que chacun d’eux ajoute à la production des deux autres ? On aura ainsi des chiffres dont le total sera supérieur à 12, et peut-être même égal à 12x3, c’est-à-dire à 36 : car si de l’ensemble formé par la main-d’œuvre, le capital et la terre associés on détache soit l’un, soit l’autre de ces trois facteurs, le produit tombera très bas, ou même deviendra nul.

Mais ce qui règle la valeur des moyens de production, comme des autres biens, c’est leur valeur d’usage marginale. Il faut donc tenir compte, dans un problème comme celui que nous venons de poser, des possibilités qui existent de déplacements et de substitutions des moyens de production. La part contributive de la main-d’œuvre dans la production que nous con sidérons, dès lors, sera déterminée par ce que produit l’ouvrier dont le travail, dans l’ensemble de l’économie, est le moins productif. Mettons qu’elle puisse, de la sorte, être estimée à 4. Par un procédé identique, on estimera ensuite celle du capital ; et si celte dernière est de 3, il restera 5, sur le produit total, qu’il faudra attribuer à la terre.

On fera peut-être, à la méthode dont nous avons usé pour résoudre notre problème, le reproche de ne pas le résoudre effectivement, et de reculer seulement la difficulté. En effet, nous avons vu que, considérant en lui-même le complexus des moyens productifs qui concourent à une même production, on ne pouvait pas estimer la part qui revient à chacun de ces

  1. Sur le point dont nous allons parler, voir Wieser, Der natürliche Werth, liv. III, 1re partie, chap. 4-8, Marshall, Principles, liv. VI, chap. 1, Hobson, The economics of distribution, chap. 4, 1re partie.