Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/584

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

treprises privées, les gros émoluments des administrateurs et des employés supérieurs sont pour donner à tous une idée avantageuse de la grandeur et de la solidité de ces entreprises. Nous ne représenterons pas, d’autre part, que les « besoins » des ouvriers, c’est à-dire leurs exigences, peuvent influer sur la population et par là amener une modification des salaires : car ce ne serait là qu’une influence indirecte, qui s’exercerait par l’Intermédiaire d’un facteur « économique » — l’offre de main-d’œuvre — . Mais ces exigences des ouvriers peuvent leur faire préférer parfois le chômage à des salaires qu’ils estimeraient insuffisants : par là — nous aurons à y revenir — les salaires se trouveront élevés, et il n’est pas impossible que la condition de la classe ouvrière dans son ensemble en soit changée.

Les quelques exemples ci-dessus montrent qu’il y a du vrai dans la théorie que nous avons exposée. Mais en tant qu’elle se présente comme exclusive, elle est inadmissible. Mille faits la démentent. C’est ainsi que dans la hiérarchie sociale les « employés » sont mis au-dessus des « ouvriers » ; et cependant les salaires des premiers sont tombés au-dessous des salaires des deuxièmes, tout au moins des salaires des ouvriers qualifiés : ce qui ne saurait s’expliquer que par ce fait, que les aptitudes nécessaires pour faire mi « employé » — un commis de magasin, par exemple, un comptable, etc. —, ces aptitudes, après avoir été longtemps plus rares que celles qui soit requises des ouvriers manuels, même qualifiés, sont devenues très communes depuis la diffusion de l’instruction. Mais le tort capital de notre théorie, ce qui nous oblige surtout à la rejeter, c’est qu’il n’est pas possible de concevoir l’enchaînement de phénomènes, le processus par lequel elle devrait se réaliser. On ne saurait comprendre par exemple comment, un certain état économique étant donné, le progrès des doctrines égalitaires pourra provoquer une hausse des salaires — à moins que ce ne soit en ces manières, et dans cette mesure que nous avons dites tantôt —. Au contraire, quand on cherche dans les faits dits économiques les plus importants tout au moins des facteurs qui gouvernent la distribution, il est possible, ainsi qu’on le verra, d’expliquer d’une manière complète, c’est-à-dire parfaitement intelligible, le mécanisme par lequel les salaires, comme les autres sortes de revenus, sont réglés.

333. La question de la valeur des moyens productifs. — C’est sur la théorie de la valeur qu’il faut s’appuyer pour construire la théorie de la distribution. Mais parmi les parties de la théorie de la valeur, on aura à utiliser d’une manière particulière ce qui a trait à la valeur des moyens de production. Il est des revenus qui ne représentent pas autre chose, à l’ordinaire du moins, que le prix de moyens de production qu’on a vendus : le salaire paie la main-d’œuvre, comme nous l’ayons indiqué, et l’intérêt paie la disposition temporaire du capital ; mais la main-d’œuvre, le capital sont