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1° Parmi les causes des crises, il en est qui sont constituées par des faits accidentels. On recourt au crédit pour fonder ou pour faire marcher des entreprises, et l’on compte que l’on pourra toujours se procurer des capitaux aux mêmes conditions. Mais telle ou telle circonstance peut diminuer, à un moment donné, la quantité des capitaux disponibles et élever le taux de l’intérêt. Le crédit devenant plus cher, c’est un accroissement des frais de production, lequel pourra mettre beaucoup de producteurs dans l’impossibilité de continuer leurs affaires. De même si la monnaie devient rare dans un pays par suite de dépenses élevées auxquelles ce pays se sera livré à l’étranger, ou pour toute autre raison, des troubles graves pourront s’en suivre dans son économie, tant par l’effet du renchérissement du crédit que par celui de la baisse des prix, en attendant qu’on revienne à l’ancien équilibre ou qu’un équilibre nouveau s’établisse. Et nous devons signaler encore, puisque nous parlons des phénomènes monétaires comme causes des crises, les conséquences fâcheuses que peuvent avoir — toujours par leur action sur le taux de L’intérêt d’une part et sur les prix de l’autre — ces fluctuations du stock monétaire qui résultent des émissions de papier-monnaie.

2° Les crises ne peuvent-elles pas avoir leurs causes ailleurs que dans des phénomènes accidentels ?

Chez divers auteurs socialistes, on trouve celle opinion exprimée que les crises sont une conséquence nécessaire du caractère anarchique qu’a la production dans le régime « capitaliste », du fait que dans ce régime on produit des marchandises sans savoir si ces marchandises pourront se vendre un prix rémunérateur. Mais si nous laissons de côté ces conceptions particulières que nous avons discutées plus haut et que nous avons dû rejeter, il est clair que nous n’avons pas là une explication suffisante des crises. Les crises sans doute ne peuvent éclater qu’en régime capitaliste : dans une économie où le crédit ne joue aucun rôle, ou à peu près, où l’on produit sur commande, ou pour satisfaire des besoins déjà existants et connus, il ne saurait y avoir de crises ; c’est pourquoi, comme nous l’avons vu, les crises apparaissent au XIXe siècle seulement, et tout d’abord en Angleterre, c’est-à-dire dans le pays qui le premier a passé au régime capitaliste. Mais ceci ne nous dit pas encore pourquoi il y a des crises.

À la vérité, il existe, dans l’ordre qui nous occupe ici, des causes multiples des crises.

1° Il faut tenir compte, en premier lieu, de cette illusion si répandue qui fait que, une marchandise se vendant un certain prix, on s’imagine qu’une quantité quelconque de cette même marchandise pourra s’écouler au même prix. Cette illusion pourra conduire à développer d’une manière excessive certaines productions : la chose du moins pourra arriver pour ces productions où les résultats des entreprises ne peuvent être connus qu’au