Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/506

Cette page n’a pas encore été corrigée

possesseur du cheval, nous supposerons, n’est disposé à céder celui-ci que contre une somme d’au moins 300 francs. L’échange, dès lors, ne sera possible que si l’individu qui a l’argent est disposé à donner 300 francs, ou plus, pour avoir le cheval. Imaginons qu’il soit disposé à aller jusqu’à 500 francs ; comment, dès lors, la valeur du cheval s’établira-t-elle ? Tout ce que l’on peut dire d’une manière générale, c’est qu’elle ne sera pas inférieure à 300 francs, et qu’elle ne dépassera pas 500 francs. Quant à la fixation précise du prix, elle résultera d’un marchandage entre le vendeur et l’acheteur. Si l’acheteur sait que le vendeur vendrait même à 300 francs, et si le vendeur, cependant, est dans une ignorance complète de ce que l’acheteur consentirait à payer, l’acheteur aura toutes chances d’obtenir le cheval à 300 francs. Si c’est le vendeur qui connaît l’intensité du besoin que l’acheteur a du cheval, et si l’acheteur ignore les dispositions du vendeur, c’est sans doute 500 francs que le cheval sera vendu. Si aucun des échangistes ne sait ce que l’autre est disposé à faire, l’issue du marchandage dépendra de l’habileté plus ou moins grande qu’ils déploieront peur se tromper l’un l’autre sur leurs dispositions véritables. Si enfin chacun des échangistes connaît les dispositions de l’autre, le problème sera résolu par le jeu d’autres facteurs, que l’on peut imaginer.

3° Chacun des deux individus en présence possède un bien divisible : l’un par exemple a un panier de pommes, et l’autre un panier de noix[1]. Ici le problème devient plus difficile. C’est que, pour conclure l’échange, nos deux individus peuvent procéder de bien des façons. Le premier individu — que nous appellerons A — peut proposer au deuxième — que nous appellerons B — d’échanger toutes les pommes qu’il a contre toutes les noix qu’a celui-là ; il peut lui offrir une certaine quantité de pommes ; il peut lui offrir, pour commencer, une pomme ; il peut inviter B à lui faire des propositions.

Imaginons, par exemple, que A commence par offrir une pomme à B. A n’aurait pas avantage à céder sa pomme s’il devait obtenir en échange moins de 3 noix ; B, pour avoir la pomme, donnerait jusqu’à 12 noix ; la pomme, dans ces conditions, s’échangera contre une quantité de noix qui pourra aller de 3 à 12.

Le premier échange une fois opéré, d’autres pourront suivre. Chacun de ces échanges nouveaux pourra se faire selon un taux distinct : si la première pomme a été cédée contre 6 noix, il n’est pas nécessaire que les pommes qui seront cédées ensuite soient cédées également chacune contre 6 noix. Mettons donc que, pour chacune des pommes successivement cédées, le taux de l’échange doive varier. Ce qu’il faut remarquer, c’est que l’intervalle par rapport auquel ce taux de l’échange apparaît comme indéter-

  1. Cette hypothèse a été étudiée par Marshall ; voir ses Principles, liv. V, chap. 2, note finale.