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constituent leur portefeuille, étant à terme, ne permettent pas de rembourser les billets sur l’heure, comme il faudrait faire si les porteurs de ces billets l’exigeaient. Si donc les banques d’émission laissent leur encaisse diminuer trop, elles s’exposent, pour le cas où telle éventualité se produirait qui ferait affluer les porteurs de billets aux guichets, à manquera leurs engagements ; et tout d’abord elles risquent de diminuer la confiance qu’on peut avoir dans leur papier, ce qui n’irait pas sans jeter du trouble dans les affaires.

C’est en faisant varier le taux de l’escompte que les banques d’émission régleront leur circulation et leur encaisse. On demande souvent à ces banques, en France notamment, de tenir le taux de l’escompte toujours au même niveau : la situation particulière de la France, où il y a toujours beaucoup de capitaux en quête d’emplois, permet effectivement à la Banque de France de ne faire varier que rarement le taux de l’escompte. Mais c’est une erreur de croire qu’il soit possible de tenir ce taux fixe.

Une question spéciale est celle de savoir comment il convient que les banques d’émission se comportent quand une crise éclate, ou quand on a des raisons sérieuses de croire qu’elle approche. C’est une opinion qui a été exprimée plus d’une fois, qu’en émettant beaucoup de billets, en fournissant en grande abondance, en conséquence, les moyens de paiement et les instruments de crédit, les banques peuvent empêcher la crise d’éclater, ou en atténuer grandement la gravité. Mais dans de tels moments, c’est de la monnaie métallique que l’on cherche, bien souvent, et non pas des billets : car les crises, à l’ordinaire, doivent en partie leur origine à l’excès des engagements que l’on a pris envers l’étranger. Et même en négligeant ce fait, on aperçoit aisément qu’il vaut mieux resserrer le crédit que de le distribuer plus largement : d’une part il est nécessaire de protéger l’en caisse métallique, qui aurait vite fait de disparaître ; d’autre part il n’est pas mauvais, il peut être bon, au point de vue des intérêts collectifs, de précipiter une liquidation indispensable, de mettre fin, même au prix de quelques dommages individuels, à une situation dont la prolongation pourrait être funeste à l’économie. En de telles matières d’ailleurs, la théorie ne peut formuler que des indications générales, et quelque peu vagues. Ce n’est que le tact des praticiens qui pourra décider, quand une crise se produira ou menacera de se produire, à quel moment, dans quelle mesure il sera avantageux ou nécessaire de diminuer la circulation des billets en élevant le taux de l’escompte.