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abaisser le taux de l’escompte ; la quantité du papier présenté s’accroîtra immédiatement, et il pourra être émis davantage de billets.

Les banques peuvent donc, selon qu’il leur convient, émettre plus ou moins de billets. Mais il importe de dire qu’il y a pour l’émission des billets une limite qu’il est impossible de dépasser. Imaginons que les billets avant été émis dans un pays en grande quantité, beaucoup d’or ait été exporté. Si l’on continue à émettre des billets, un moment viendra où il n’y aura plus d’or que dans l’encaisse des banques émettrices. Et comme c’est l’or dont on se sert pour les paiements à l’étranger, on viendra aux guichets de ces banques convertir les billets en or. De la sorte, l’encaisse des banques finira par disparaître, et elles se trouveront dans l’impossibilité de tenir leurs engagements.

256. Comment convient-il de régler l’émission des billets ? — Nous venons d’indiquer la limite extrême que l’émission des billets ne saurait dépasser. Peut-on approcher de cette limite, ou convient-il de s’arrêter long temps avant ? Les économistes, là-dessus, font preuve à l’ordinaire d’une prudence excessive. C’est qu’ils considèrent la monnaie de papier comme une monnaie anormale. C’est qu’ils redoutent cette exportation de la monnaie de métal que l’émission abondante des billets de banque ne peut pas manquer de provoquer. Mais nous avons dit déjà qu’il n’y avait pas lieu d’adopter une telle manière de voir, et que lorsqu’une nation peut employer une partie de sa monnaie métallique à faire des achats à l’étranger, c’est tout profit pour elle.

Faut-il, maintenant, chercher dans des émissions excessives de billets de banque la cause des crises qui se produisent de temps à autre dans l’économie des nations, et qui intéressent parfois l’économie mondiale[1] ? On l’a supposé jadis. Mais dans cette vue, il y a pour le moins une très forte exagération. Il est permis de voir dans l’abus du crédit, sinon la cause unique, du moins la cause principale des grandes crises économiques. Mais ce ne sont pas seulement, tant s’en faut, les émissions de billets de banque qui peuvent constituer l’abus du crédit. Celui-ci est donné sous bien d’autres formes que sous la forme de billets de banque servant à escompter du papier. En un sens même, la surabondance des billets de banque n’est que la conséquence de la surabondance du papier de commerce ; et tout ce que l’on peut dire, c’est que l’émission des billets aide à ce développement des affaires de crédit qui aboutira à la crise.

Il reste cependant que les banques d’émission ne sauraient, sans s’exposer à de graves dangers et sans en faire courir à l’économie à laquelle elles appartiennent, laisser le rapport de leur circulation à leur encaisse dépasser une certaine grandeur. Les effets de commerce qui

  1. Voir sur ce point Arnauné, La monnaie, 3e partie, chap. 3, pp. 480 sqq.