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rement ou par rémission d’un chèque. Les billets de banque, ainsi, sont émis surtout comme contre-partie d’apports de numéraire. Et c’est ce qui explique que, dans certaines grandes banques d’émission comme la Banque de France et la Banque d’Angleterre — lesquelles sont obligées par le législateur de se limiter à de certaines opérations, et ne peuvent pas employer à leur gré les dépôts qui leur sont confiés — l’écart de la circulation et de l’encaisse soit toujours faible maintenant.

Le billet de banque est tout d’abord un titre de créance : par ce billet, en effet, le banquier qui l’a émis s’engage à payer une somme déterminée. Mais c’est un titre de créance d’une espèce tout à fait particulière, et tel qu’il constitue une monnaie véritable. Il est, en effet, au porteur, tandis que les autres litres de créance, pour la plupart, sont nominatifs et ne peuvent être transmis que moyennant certaines formalités. Il est remboursable à vue, et non point à une échéance plus ou moins éloignée. Il n’est pas productif d’intérêts. Enfin, il a une valeur ronde, qui s’harmonise avec le système monétaire en vigueur.

252. Une controverse sur le billet de banque. — Toutefois, s’il est bien plutôt une monnaie qu’un litre de crédit, comme monnaie aussi le billet de banque possède ou peut du moins paraître posséder, à de certains égards, des caractères spéciaux. Des questions surgissent à propos de lui qu’on a beaucoup discutées, et sur lesquelles l’accord n’est point encore fait. À l’époque où l’on a commencé à étudier d’une manière approfondie les banques et l’émission des billets, c’est-à-dire dans la première moitié du XIXe siècle, deux théories opposées sont apparues : l’une, que l’on appelle théorie de la circulation — currency theory — a été tirée, peut-on dire, delà doctrine de Ricardo sur la monnaie ; à l’autre, qui se fonde sur le banking principle, on peut donner pour père Adam Smith ; mais le premier qui l’a exposée et défendue d’une manière systématique fut Tooke, dans ceux de ses écrits qu’il publia à partir de 1840[1]. Et aujourd’hui encore les économistes se partageraient entre ces deux théories.

En quoi consistent, exactement, les deux opinions en présence ? Pour ce qui est, en premier lieu, de la currency theory, elle pourrait se résumer dans les propositions suivantes :

1° l’émission des billets de banque augmente la quantité de monnaie en circulation ;

2° augmentant la quantité de monnaie qui circule, l’émission des billets de banque élève les prix ;

3° les banques ont la possibilité d’émettre des billets à leur gré ;

4° en conséquence, il est nécessaire de régler les émissions si l’on veut régler, dans un pays, l’entrée et la sortie de la monnaie métallique.

  1. Sur la currency school et le banking principle, voir Laughlin, Principles of money, chap. 7.