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seront favorisées par là, cependant que les exportations seront, au contraire, entravées. En fin de compte, notre pays aura perdu de la monnaie métallique, ce qui, par soi, n’est pas un dommage ; il aura reçu plus de marchandises et en aura donné moins, ce qui représente un profit.

Si, maintenant, l’émission du papier prenait de certaines proportions, toute la monnaie métallique s’en irait, et, cette monnaie partie, le papier subirait une dépréciation. Mais la dépréciation de la monnaie dans un pays, comme nous le verrons plus tard, si elle détermine les rapports nominaux de valeur selon lesquels ce pays pourra faire des échanges avec les pays voisins, n’influe point par elle-même sur les conditions réelles de ces échanges. Elle est donc indifférente.

Des remarques précédentes, des conséquences intéressantes se peuvent tirer. Nous en indiquerons une. Imaginons un État qui ait de grosses dépenses à effectuer, auxquelles il ne peut pourvoir avec ses revenus. Notre État peut emprunter : mais s’il emprunte à ses nationaux, il se grève pour un temps plus ou moins long ; et s’il emprunte à l’étranger, il grève la nation. En émettant, au contraire, du papier-monnaie, ou bien il chasse du pays une certaine quantité de monnaie métallique, auquel cas, enrichissant le pays de ce qui sera acheté avec cette monnaie métallique, on peut dire qu’il fait supporter à l’étranger la charge des dépenses qu’il veut effectuer ; ou bien, s’il n’y a pas de monnaie métallique en circulation dans notre pays, l’opération équivaudra — d’une certaine manière — à la levée d’une contribution sur les nationaux.

Voilà ce qu’il importe de dire, en faveur du papier-monnaie ou à sa défense. Mais il importe aussi de voir les inconvénients ou du moins les dangers de ce papier-monnaie. Les émissions de papier convertible, de billets de banque ordinaires, tout en se proportionnant, d’une certaine façon, aux besoins du marché, se modèrent, en quelque sorte, nécessairement : les établissements émetteurs, s’ils sont dirigés avec prudence, prendront toujours les mesures qu’il faut pour ne pas se mettre dans le cas de ne pas pouvoir tenir leurs engagements. Mais quand il s’agit du papier-monnaie, la tentation sera grande d’en accroître, d’en multiplier les émissions : il y a là, pour les États, un moyen si commode de se procurer des ressources ! Or des émissions mal réglées auront pour effet des variations sensibles de la valeur de la monnaie. Ces variations, pour autant qu’elles se produiront, causeront du trouble dans les affaires ; pour autant qu’on redoutera de les voir se produire, elles entraveront les affaires. Sans compter qu’elles pourront être aggravées — ceci résulte de ce que nous expliquions plus haut — par la confiance tantôt plus grande, tantôt moins grande dont le papier-monnaie jouira.

249. Leur histoire. — Nous avons dit que l’histoire du papier-monnaie, dans les pays occidentaux, avait commencé il y a environ deux siècles.