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amortir celle-ci. Depuis sa fondation, le Crédit foncier a donné aux particuliers pour environ 5,3 milliards de crédit ; à la date du 31 décembre 1905, les prêts en cours s’élevaient à 1.972 millions, alors que le total des dettes hypothécaires en France est estimé à 18 milliards[1]. La comparaison des sommes prêtées dans l’année 1905 au nombre des prêts fait ressortir pour chaque prêt une moyenne de 26.400 francs environ. Ainsi les opérations du Crédit foncier apparaissent comme étant surtout de grosses opérations ; et nous devons ajouter que les prêts consentis par cet établissement sont, pour les trois quarts, des prêts urbains[2].

En Autriche, en Russie, dans plusieurs autres pays encore, l’organisation du crédit hypothécaire affecte des formes multiples : on y trouve, à côté de banques qui cherchent à réaliser des bénéfices, des institutions publiques régionales ou nationales. Mais il y a aussi des pays, comme l’Angleterre et les États-Unis, où il n’existe pour ainsi dire point d’institutions, privées ni publiques, pour s’occuper spécialement de cette sorte de crédit.

Sur les résultats que le crédit hypothécaire a donnés, là où on l’a organisé d’une manière particulière, les avis sont partagés. Pour certains auteurs, si l’organisation de ce crédit a eu de bons effets — en permettant, notamment, à certains propriétaires fonciers d’améliorer leurs terres, de les exploiter mieux —, elle a incité d’autres propriétaires à s’endetter, et les a conduits à la ruine : en définitive, le mal l’emporterait sur le bien. Ces auteurs regrettent donc la création de ces institutions que nous avons étudiées ; ils se déclarent les adversaires, pour une raison analogue, de ces mesures législatives — tel l’Act Torrens, en vigueur dans la Nouvelle-Galles du Sud — qui, facilitant le transfert du litre de la propriété foncière, opèrent, comme on dit, la mobilisation de cette propriété. Ils préconisent, au contraire, des lois comme la loi américaine du homestead, laquelle autorise le propriétaire exploitant lui-même à rendre insaisissable sa maison et une certaine étendue de terre à l’entour jusqu’à concurrence d’une valeur déterminée. Cette opinion toutefois — tout au moins en ce qui concerne les institutions de crédit hypothécaire — ne paraît guère pouvoir être soutenue que par rapport à certains pays, à certaines régions où la population, dans son ensemble, est ignorante et imprévoyante.

208. Crédit réel mobilier. — Nous avons parlé déjà de cette loi française de 1898 qui a créé les warrants agricoles : elle offre ceci d’intéressant qu’elle a rendu le crédit plus accessible à une catégorie très nombreuse de producteurs — les agriculteurs — qui, jusque-là, n’étaient point accoutumés à y recourir comme d’autres producteurs — les industriels, les commerçants — font couramment depuis longtemps. Mais nous ne

  1. Les inscriptions d’hypothèques, en France, s’élèvent à environ 2 milliards par an (voir l’Annuaire statistique de 1905, p. 76).
  2. Ces chiffres d’après Schmoller, et l’Annuaire statistique, p. 61.