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avec 265.000 membres, assurant un capital de 250 millions. En Belgique, ces associations étaient, en 1901, au nombre de 842, assurant plus de 67.000 bêtes bovines, plus de 5.000 chevaux, puis encore des chèvres, pour une valeur totale d’environ 75 millions de francs.

Toutes ces associations dont nous venons de parler rendent de grands services aux petits agriculteurs, mais deux remarques doivent être faites[1].

1o En même temps qu’à la petite production agricole, l’association, dans certains cas, profite aussi à la moyenne ou à la grande. On a pu citer même des associations agricoles de crédit qui refusaient de prêter aux petits propriétaires.

2o L’association agricole, sous les formes que nous connaissons, supprime certaines des causes qui mettent la petite exploitation en état d’infériorité par rapport à la grande ; elle ne les supprime pas toutes. Pour que toutes les causes d’infériorité de la petite exploitation — ou presque toutes — fussent abolies, il faudrait que l’on en vînt à appliquer le principe coopératif aux travaux mêmes de la culture, que celle-ci devînt collective, comme sont devenus collectifs déjà, sur bien des points, les achats, la préparation des produits pour la vente, les ventes.

Il n’est pas impossible, toutefois, que l’on s’engage un jour ou l’autre dans cette voie. Le développement de ces sortes d’associations agricoles que nous voyons fonctionner aujourd’hui est un démenti éclatant de certaines prédictions pessimistes que l’on formulait il y a quelques années à peine. On avait trop parlé de l’ignorance, de l’esprit de routine et de l’individualisme forcené du paysan. Celui-ci s’instruit tous les jours davantage ; et la pression de l’intérêt, dans ces conditions, pourrait bien l’amener, dans un avenir prochain, à s’éloigner beaucoup plus encore qu’il n’a fait dans ces dernières années de sa façon de penser et d’agir de naguère[2].

145. L’influence du régime de l’exploitation. — Il nous reste à indiquer certain rapport qui existe entre la question de la grandeur des exploitations agricoles et la question du régime — comme l’on dit — de l’exploitation du sol. L’industriel qui a, par exemple, une usine, ou bien l’exploitera lui-même, ou bien la fera exploiter pour son compte par un directeur, ou bien la vendra ; il ne prendra pas, sauf exception, le parti de la

  1. Pour l’estimation des avantages que la petite propriété agricole a retirés, et peut retirer de l’association coopérative sous ses diverses formes, on peut consulter d’une part Kautsky (Question agraire, chap. 6, c), de l’autre Gatti, Le socialisme et l’agriculture, trad. fr., Paris, Giard et Brière, 1902, 2e partie, chap. 2 à 4, passim : les thèses de ces deux auteurs sont opposées.
  2. Notons que le paysan danois, par exemple, accepte que la coopérative à laquelle il est affilié contrôle la manière dont il nourrit ses bêtes, etc. : et on pourrait noter ailleurs d’autres faits du même genre.