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les relations politiques internationales, parce que ces relations sont de plus en plus soumises au contrôle des peuples, que ceux-ci apprennent toujours mieux, eux aussi, à connaître leurs intérêts, et que la fréquence toujours croissante des échanges internationaux de toutes sortes les oblige à attacher toujours plus d’importance aux affaires extérieures. Et que de choses il y aurait à dire sur les changements que l’incessante évolution économique introduit perpétuellement dans les mœurs, dans la manière de vivre et de penser des nations et des classes sociales ! Bornons-nous à citer, à titre d’exemple, l’influence si considérable des conditions économiques sur la criminalité, influence qui a été étudiée par nombre de criminologistes[1].

L’interdépendance étroite des faits économiques et des faits sociaux de tous ordres a conduit certains auteurs à concevoir que l’économique ne devait pas être traitée comme une discipline spéciale, que l’aspect économique de la vie sociale ne devait pas être séparé des aspects différents avec lesquels il est en connexion. Historiquement sans doute, l’économique s’est constituée en dehors de toute recherche de sociologie générale. Les études économiques avaient un long passé déjà, que le nom de sociologie n’avait pas été créé. Mais on conteste précisément l’importance, au double point de vue théorique et pratique, de ces résultats que les travaux purement économiques ont pu donner. Et l’on soutient que l’économique ne doit plus prétendre être cultivée à part, que tout sociologue doit considérer sans cesse le tout du complexus social.

Une pareille conception appelle tout d’abord cette observation que si l’économique peut être regardée, dans sa plus grande partie, comme une branche de la sociologie, cependant elle n’est pas seulement cela. L’étude des institutions juridiques, par exemple, relève du seul sociologue : car il n’y a de droit que là où il y a une multiplicité d’hommes entretenant ensemble des relations régulières. Mais pour ce qui est de l’activité économique de l’homme, si elle se déploie, en fait, dans la société, nous ne devons pas oublier qu’il peut y avoir une économie de l’individu isolé, que des vérités économiques peuvent être énoncées où l’idée de rapports sociaux ne sera nullement impliquée.

Négligeons cette remarque ; faisons de l’économique une branche de la sociologie : nous dirons alors qu’il est nécessaire que l’économiste n’ignore pas les liens de l’économique avec les autres études sociologiques ; nous dirons qu’il faut qu’il y ait des gens pour s’occuper de ces liens. Mais il sera permis aussi de considérer à part les phénomènes économiques, ou, si l’on veut ainsi parler, l’aspect économique de la vie sociale. Cela sera

  1. Voir Ferri, La sociologie criminelle, chap. 2, 2 (trad. fr., Paris, Michalon, 1901), Tarde, La philosophie pénale, Paris, Masson, 1890, chap. 6, II.