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part, entre la science et l’art, de l’autre, des communications, et de quelle nature elles seraient.

Étudier les communications qui pourraient exister entre l’histoire et la science économiques, c’est discuter les conceptions de l’école « historique ».

Parmi les auteurs qui se sont rangés dans cette école, il s’en est trouvé pour regarder comme inutiles toutes les recherches autres que les recherches historiques. Les chefs de l’école, toutefois, ne sont point tombés dans ces excès, ils n’ont pas manqué de reconnaître qu’il y avait des lois économiques, et par suite, une science économique. Ce qu’ils ont soutenu, c’est qu’il n’y a pas de lois économiques universelles ou absolues — c’est-à-dire n’ayant de rapport qu’avec l’homme dans ce qu’il aurait d’éternel, et avec certaines conditions extérieures également éternelles. — Il n’y aurait, d’après eux, que des lois économiques historiques, relatives à telle ou telle phase de l’évolution économique, à tel ou tel mode d’organisation économique. Les lois économiques ne s’appliqueraient jamais qu’à une portion limitée du temps et de l’espace.

Les vues des économistes de l’école historique sont fondées en partie. S’il y a des lois économiques « universelles », c’est-à-dire valables pour toutes les sociétés, les lois qui atteignent à ce degré de généralité sont peu nombreuses. Et la science économique, si on veut lui donner tout son développement, devra prendre en considération la diversité des conditions naturelles, techniques, juridiques dans lesquelles l’activité économique des hommes se déploie. Il y aura ainsi, par exemple, des lois de la rente foncière : ces lois impliquent le fait historique de l’appropriation de la terre.

Les lois économiques supposent donc pour la plupart des faits que l’histoire fournit, et qui sont localisés dans le temps et dans l’espace. On peut même aller plus loin, et dire que les lois « universelles », comme on les appelle, sont dans le même cas. Le fait qu’il y a des hommes qui sont des êtres raisonnables, qui vivent en société et qui satisfont certains tout au moins de leurs besoins en acquérant des biens échangeables, ce fait primordial, qui rend possible la constitution d’une science économique, n’est-il pas un fait historique ?

La science économique, en somme, se comporte comme toutes les autres sciences du réel. La chimie prend acte de l’existence de ce qu’on nomme la matière, et note certaines propriétés tout à fait générales de celle-ci ; puis elle s’occupe des différents corps et de ces lois spéciales qui se vérifient pour chacun d’eux. La physiologie énonce des vérités qui s’appliquent à tous les êtres vivants, d’autres qui se rapportent à telle ou telle espèce. Toujours la science expérimentale implique la connaissance historique : car les lois ne sont pas autre chose que des généralisations des faits.