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timant cette chance du mieux que l’on peut, et enfin faire la balance : cette balance nous apprendra si l’opération est avantageuse, ou désavantageuse, et combien elle l’est. Si le risque est de ceux que le calcul démontre favorable, il ne faudra pas hésiter à l’affronter, quelque dur que cela paraisse à de certaines gens inaptes au raisonnement : Pascal l’a affirmé avec force, et il a eu raison[1]. Et si le risque est défavorable, le calcul expliqué ci-dessus indiquera quels sacrifices on peut consentir pour y échapper.

Nous avons dit que nous devions, devant tous les risques, régler notre attitude de la même manière. Il faut cependant faire une réserve. Cette réserve est relative aux risques qu’il s’agit pour nous d’assumer ou de ne pas assumer, et qui nous mettent en présence d’un adversaire ; et elle doit être faite quand cet adversaire peut déterminer les chances avec plus d’exactitude que nous. Dans ce cas, en effet, nous devons nous abstenir de jouer. Sur un champ de courses, au pari mutuel, un individu qui ignorerait la valeur des chevaux — et qui serait obligé, par conséquent, d’attribuer à tous les chevaux partants les mêmes chances — serait désavantagé par rapport à ceux qui ont des informations sur le passé et sur la condition présente de ces chevaux. Et surtout il est très mauvais de jouer contre des gens mieux renseignés que nous quand ces gens sont en mesure d’influer sur l’événement dont dépend l’issue de la partie, alors que nous ne pouvons pas le faire, ou quand ils sont en mesure d’influer sur cet événement plus que nous ne pouvons faire nous-même : c’est ce qui explique — en même temps que d’autres raisons — que le jeu à la Bourse soit funeste, en général, aux petits joueurs.

54. De l’attitude qu’il convient d’adopter devant les risques défavorables. — Soit un individu qui est en présence d’un risque défavorable. Que lui sera-t-il possible de faire pour supprimer l’inconvénient de ce risque, ou tout au moins pour l’atténuer ?

1o Il est possible, tout d’abord, de travailler à faire disparaître les causes d’où pourrait résulter la perte qu’on redoute, ou de mettre des obstacles à leur action. Si nous craignons des incendies, par exemple, nous pouvons remplacer les matières combustibles par des matières incombustibles, et nous pouvons prendre des précautions pour rendre, en cas de nécessité, la lutte contre le feu plus efficace.

Ceci, toutefois, se rapporte à ces choses extérieures auxquelles le risque est attaché, et point à ce qu’il y a dans le risque de spécifique, c’est-à-dire à l’incertitude où nous sommes touchant les événements futurs.

2o Pour ce qui est de l’élément spécifique du risque, on peut agir sur lui en augmentant son savoir. Connaissant les données des problèmes dans leurs particularités, sachant en outre l’influence de chacune de ces particularités, nous serons en mesure de substituer à des prévisions relatives à

  1. Dans le fameux morceau des Pensées sur le « pari ».